Oh, mais c’est que Greenpeace nous gratifie d’une nouvelle perle 😍
Bon ben…
Débunkons ? 😁
Commençons par le plus réjouissant : les rédacteurs de Greenpeace France ont appris à citer leurs sources. Pas à les lire, par contre…
C’est génial, on gagne un temps fou ! Quand ils citent une phrase, y’a qu’à cliquer sur le lien et lire le paragraphe suivant pour les contredire 😍
Parlons du fond : cet article est une charge contre l’usine d’Orano La Hague, et plus largement contre le retraitement du combustible nucléaire usé.
Greenpeace, et notamment son directeur de campagne nucléaire, qui est riverain, en ont la haine. Pourquoi donc ?
La réponse est éparpillée dans mes threads (et, un jour, mes billets) sur le cycle du combustible nucléaire, et en particulier, naturellement, sur ce qu’on appelle l’aval du cycle :
Si vous les avez d’ores et déjà lus, alors vous savez que le retraitement du combustible usé :
- simplifie le problème des déchets en amenant les produits de fission et actinides mineurs vers une forme chimique stable (vitrification) ;
- réduit, au passage, le volume de ces déchets, et réduit considérablement leur radiotoxicité sur le long terme (d’un facteur 10 environ) ;
- réduit d’environ 10% la consommation française d’uranium naturel, avec des conséquences substantielles sur l’impact environnemental de l’industrie, celui des mines étant notablement élevé ;
- est la porte ouverte vers un recyclage très poussé qui réduirait à néant notre consommation d’uranium naturel. La route de l’indépendance.
Bref : un nucléaire plus durable, moins polluant, et des déchets moins nocifs, plus faciles et moins coûteux à gérer.
…Tout ce que Greenpeace déteste, car nuisant terriblement à leur discours.
En contrepartie, le retraitement consiste en une activité industrielle de chimie lourde et nucléaire en même temps, donc qui affiche indéniablement ses propres risques et impacts environnementaux.
…Tout ce que Greenpeace, à juste titre (a nuancer de leur incapacité à pondérer) déteste.
Oui, c’est en ça qu’ils sont géniaux, ils détestent les avantages et les inconvénients.
Bon, il y a quand même quelque chose qu’ils apprécient : le retraitement a un coût économique non négligeable, surtout lorsque l’uranium naturel ne coûte rien.
Et ça, ils aiment.
Ben oui : plus ils pourront peser vers une augmentation des coûts, plus ils pourront pousser vers un abandon du retraitement ou un coût plus élevé du kWh nucléaire.
Ils sont gagnants dans les deux cas !
Bon, après ce long procès d’intention (oui, j’en suis conscient, je le signale, à vous de voir ce que vous prenez ou rejetez là-dedans), entrons dans le concret avec leur article du jour.
Je prends juste une seconde, au préalable, pour vous faire profiter du côté lumineux de La Hague.





Je ne vous cache pas un certain amour des lieux.
Ces belles choses étant vues… Il est temps de sombrer dans le côté obscur.

Tout du long, nous allons citer phrase après phrase cet article pour le commenter.
Commençons gentiment.
Alors que le débat public national sur les matières et déchets radioactifs n’en finit pas d’être repoussé, l’industrie nucléaire continue de générer des quantités de produits dangereux qui s’accumulent.
Rien de choquant… Si ce n’est que je doute que qui que ce soit, chez Greenpeace, attende le commencement du débat pour consommer de l’électricité. Elle est nulle, cette tournure « Alors que […] l’industrie continue à […] » 😋
La situation à la Hague, notamment dans la très vieillissante usine de retraitement de combustible usé d’Orano au bord de la saturation, est très préoccupante.
Alors pour la côtoyer d’assez près, disons le franchement : oui, il se passe bien quelque chose de préoccupant à l’usine.
Une défaillance d’une pièce majeure qui met au tapis une bonne partie de la production depuis presque deux mois.
Cependant, ça n’a pas d’impact sûreté ni environnement, ce n’est même pas à ma connaissance classé comme incident (ou niveau 0 max), mais ça suscite juste des inquiétudes sur les cadences de production cette année… Et donc le futur chiffre d’affaire.
Un problème industriel, pas nucléaire, donc.
Pour ce qui est de la « très vieillissante usine », avec une mise en service dans les années 60, on pourrait avoir envie de leur donner raison, mais ce n’est évidemment pas si simple. L’usine est en fait un ensemble d’usines, dont les plus âges sont d’ores et déjà en démantèlement. Quant à celles en service, elles affichent de l’ordre de 25 à 30 ans au compteur.
Faute de solution pour gérer ces déchets radioactifs, il y a urgence à fermer le robinet nucléaire.
Nous observons là un pilier idéologique de Greenpeace : il faut bloquer l’aval pour bloquer l’amont.
Si on bloque le retraitement, on bloque la production.
Si on bloque la gestion des déchets, on fragilise l’image de l’industrie.
On connaît la chanson.
La Hague, ses plages de sable fin, ses dunes, ses falaises, ses magnifiques paysages sauvages… Un véritable p’tit coin de paradis, titre d’un épisode de l’émission de France Inter « Affaires sensibles » consacré à un aspect hélas plus sombre de la région : le risque nucléaire. Avec la centrale nucléaire de Flamanville, l’usine de retraitement de combustible usé, le centre de stockage de déchets radioactifs de la Manche et des infrastructures militaires, la presqu’île du Cotentin est l’une des régions les plus nucléarisées de la planète.
Évidemment, je suis d’accord. C’est un coin de paradis, toutefois chargé en installations nucléaires de base (INB).
Sur l’ensemble du Cotentin, je compte 8 INB à la Hague (dont une pour pour l’ANDRA) et 3 à Flamanville, dont l’EPR.
Et je ne compte pas les INBS (S pour secrète) de Naval Group, Technicatome ou la Marine Nationale, pour la conception, construction et maintenance des sous-marins à propulsion nucléaire dans l’Arsenal de Cherbourg, tout simplement parce que je ne les connais pas, ni leur nombre.
S’y entassent des quantités considérables de déchets radioactifs qui font peser une menace réelle sur l’environnement, la santé et la sécurité bien au-delà de la Normandie.
Et même là, finalement, je ne vais pas chercher à les contredire : le CSM concentre un tiers du volume des déchets radioactifs actuels, et l’usine d’Orano plus de 99% de la radioactivité des déchets radioactifs actuels.
« quantités considérables » ne me paraît pas inapproprié.
Quant à « une menace réelle », ce n’est qu’une tournure dramatique pour dire, stricto sensu, « un risque non nul » ce qui est autant une évidence qu’une non-information.
Dans les piscines d’entreposage de l’usine de retraitement de combustible usé d’Orano (ex-Areva) de la Hague, environ 10 000 tonnes de combustibles irradiés refroidissent dans l’attente d’être éventuellement retraités, soit l’équivalent de plus de 110 cœurs de réacteurs !
10 008 tonnes de métal lourd initial, exactement, pour ceux qui comprennent à présent cette unité. Et pour les autres…
Ce nombre était d’actualité au 1er Janvier 2017, donc on est sur de la donnée pas trop obsolète, ça va.
Si c’est bien équivalent à environ 110 cœurs en termes de masse de combustible, ça ne l’est pas du tout en termes de quantité de radioactivité, celle-ci décroissant énormément dans les trois ans d’entreposage du combustible dans les centrales nucléaires.
La comparaison a ses limites.

EDF continue d’envoyer à la Hague plus de combustible usé qu’Orano n’en retraite : y sont expédiées chaque année quelque 1 200 tonnes de combustible usé en provenance des réacteurs nucléaires des quatre coins de France. Orano s’engage, par contrat avec EDF, à n’en retraiter que 1 050 tonnes par an et peine à y parvenir, si bien que près de 150 tonnes de combustible irradié s’ajoutent chaque année aux quantités déjà présentes dans les piscines de la Hague.
Tout à fait vrai. La différence correspond essentiellement au MOx irradié, que l’on ne retraite pas aujourd’hui.
C’est une trajectoire qui, si elle se maintient, conduit inéluctablement, tôt ou tard, à la saturation des capacités d’entreposage.
Année après année, les combustibles irradiés s’accumulent jusqu’à l’occlusion. L’engorgement de ces piscines a de nouveau été rappelé fin 2018 dans un rapport du Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN) : la marge d’espace disponible est inférieur à 7,4 %.
Il y a deux façons de jauger le remplissage des piscines. Naturellement, Greenpeace choisit la plus défavorable, je vais pour ma part vous présenter les deux.
Compte tenu de la conception des piscines, et des autorisations administratives en termes de quantités de radioactivité et de puissance thermique, l’usine est autorisée à entreposer en piscine 14 000 tML de combustible.
Actuellement, on y compte, on l’a dit, 10 000 tML, les marges sont donc encore conséquentes (~30%).
Seulement, ces 14 000 tML se répartissent en 2830 emplacements, dont 210 encore sont libres, une marge bien réduite (~7%).
La différence entre les deux dénombrements vient du fait qu’environ 200 emplacements sont occupés par d’autres choses que du combustible ; en général des déchets en attente de conditionnement.
Orano prévoit de libérer, par le transfert et le conditionnement de ces déchets, 200 emplacements supplémentaires d’ici 2030.
De même, les risques de saturation des piscines ont été pointés du doigt dans le rapport de la commission d’enquête parlementaire sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires, sur la base d’analyses de l’Institut de radioprotection et sûreté nucléaire (IRSN).
Bon, là, vu la quantités d’erreurs qu’on peut lire dans le #rapport_pompili, je ne le considère pas comme une source primaire viable et préfère remonter directement au rapport de l’IRSN.
Ce que ce dernier nous dit, c’est que, compte tenu des projets d’EDF et d’Orano, c’est à horizon 2030 que l’on risque la saturation.

Le scénario « EDF BAS » mentionné, il fait des hypothèses assez folles, je vais m’autoriser à le mettre entre parenthèses.
Notamment : 4 tranches à l’arrêt définitif en 2020 (donc Fessenheim + 2 autres moxées) sans aucune adaptation du reste du cycle, ni moxage de nouvelles tranches, ni EPR.
Ce scénario sert surtout à dire qu’on peut pas fermer des tranches sur des coups de tête, ça se prépare.
Donc si l’on regarde le scénarion de référence, au final, 2030, y’a pas urgence si on laisse pas traîner. Et EDF ne laisse pas traîner, après avoir étudié plusieurs optimisations assez marginales de ses piscines, la construction d’une nouvelle piscine dans l’usine de La Hague, l’optimisation des piscines déjà en place…
C’est finalement la construction d’une nouvelle piscine sur le site d’une centrale qui a été retenu. Le Dossier d’Options de Sûreté est déjà en cours d’instruction, et c’est l’an prochain (2020) qu’EDF compte déposer la demande d’autorisation de création.
L’IRSN souligne que ce planning est valable, mais avec peu de marge, c’est pourquoi EDF et Orano sont invités à faire des études de sensibilité et d’optimisation (par exemple, je l’évoquais plus tôt, la vidange des emplacements, dans les piscines, servant à entreposer du combustible étranger ou des déchets).
Du coup, si la piscine centralisée se fait, les problèmes sur lesquels Greenpeace insiste ici vont être réglés.
Je prends les paris, donc, qu’ils s’opposeront vivement à cette piscine. Parce qu’ils ont besoin de problèmes.
On continue dans leur article.
La situation est d’autant plus préoccupante que les installations de retraitement sont vieillissantes et connaissent des avaries. L’une des deux usines de retraitement du site d’Orano est à l’arrêt depuis mi-novembre 2018, en raison de l’usure importante d’une pièce. Le redémarrage de cette usine n’est pas prévu avant la fin du premier trimestre 2019.
Bon, ça, j’en ai parlé. C’est une belle pièce qu’il faut remplacer. Et je m’autorise à laisser sortir une petite anecdote : un des premiers problèmes à ce remplacement, ça a été de trouver par où amener cet énorme truc au bon endroit 😆
Et les déchets radioactifs – officiellement qualifiés de « matières valorisables » mais dont seule une partie sera retraitée – continuent d’arriver à la Hague…
Ici, Greenpeace s’autorise une petite folie : s’affranchir des définitions.
Non, ce ne sont pas les déchets mais le combustible usé, qui arrive à l’usine. Les déchets sont le résidus des opérations de traitement.
C’est fou d’avoir besoin de tricher sur le vocabulaire pour faire tenir son discours…
De plus, l’entreposage de ces quelque 10 000 tonnes de combustibles irradiés se fait dans des conditions qui ne répondent pas aux défis sécuritaires actuels. Et pour cause : les quatre piscines de l’usine de la Hague en exploitation ont été conçues entre 1981 et 1988.
Bon, bah pour cette phrase intéressante, il n’y a pas de source. C’est dommage, j’aurais bien aimé savoir quand l’IRSN/ASN a déploré cela.
Aux dernières nouvelles, il n’est pas envisagé de voir abrogées les autorisation d’exploiter les piscines lors des réexamens de sûreté…
Comme celles des centrales nucléaires, les piscines de la Hague sont particulièrement mal protégées en cas d’attaques extérieures.
Pour cette phrase là, on a une source qui est… Greenpeace qui se base sur un rapport qu’ils n’ont jamais diffusé et commandé par Greenpeace.
Donc on va tranquillement réfuter cette affirmation sans preuve.
Et non : poser un fumigène sur le toit d’un bâtiment de constitue pas une
« attaque extérieure » qui nécessite une quelconque forme de protection, si ce n’est juridique.
Elles ne sont toujours pas bunkerisées, alors qu’elles devraient pourtant « faire l’objet d’une conception particulièrement robuste, avec des marges suffisantes pour faire face aux risques envisageables », selon les recommandations de l’IRSN pour ce type d’installations dans son rapport sur l’entreposage du combustible usé.
Bon, là, y’a une vraie source, et la partie entre guillemets y est bien, mais…

Mais l’exigence de « bunkeriser », non. Déjà, le propos vise notamment les piscines qui reçoivent des combustibles peu refroidis, pas celles de l’usine de La Hague, donc. Mais en plus, la protection de type « coque avion », elle est dite envisageable, pas exigée.
Du coup, je vais me répéter, mais… 😝
Cette accumulation continue de substances radioactives, qu’elles soient considérées comme des « déchets » ou des « matières », pose la question de la pertinence du retraitement du combustible usé. La France a fait le choix de développer une filière de « retraitement », avec pour objectif initial d’extraire du plutonium pour des raisons militaires.
Le nom même des deux usines Orano de la Hague en exploitation rappelle cette vocation première : UP2 800 et UP3 A, pour « Usine d’extraction de Plutonium »
Ah, là, on a du juste ! J’ai oublié de le mentionner dans les raisons pour lesquelles Greenpeace a la haine du retraitement : Greenpeace, historiquement, c’est la lutte contre l’atome à usage militaire, et notamment contre les essais nucléaires.
Et le retraitement, le procédé PUREX de séparation de l’uranium et du plutonium, il a effectivement une origine militaire, mis à profit dans les usines UP1 et UP2-400, toutes deux en démantèlement aujourd’hui, pour retraiter le combustible des réacteurs graphite (et peut-être eau lourde ?) qui fournissaient du bon plutonium, de qualité militaire, et, justement, en faire profiter les forces de dissuasion françaises.
Par contre, les usines actuelles, UP2-800 et UP3-A, si elles empruntent le nom de leurs ancêtres, elles ont pour but le retraitement à usage civil du combustible issu des réacteurs à eau légère (REP et REB). Historiquement, l’une pour le combustible français, l’autre pour le combustible étranger. Et un peu de combustible de réacteurs de recherche ou de réacteurs navals.
De fait, ces deux unités continuent de produire du plutonium ainsi que quantité de déchets dangereux. Le « recyclage » mis en avant par Orano et censé aujourd’hui être l’objectif premier de ces activités est en réalité extrêmement limité.
Bon, là, ça part un peu en vrille…
Séparer le plutonium pour le recycler et les PF pour les vitrifier, c’est le principe du procédé, en fait. Donc oui, les usines continuent, c’est… C’est le but… 😓
Selon un rapport du HCTISN, le taux de « recyclage » est dans les faits inférieur à 1 % des 1 200 tonnes de combustible usé produites chaque année.
Une fois encore, il suffit de lire la source pour voir ce qui ne va pas…
Mais j’vais pas détailler : comme ils sont pas très originaux chez Greenpeace, j’ai une longueur d’avance sur ce coup là ^^ :
1 à 2 % de plutonium, dont une partie est destinée à être réutilisée. Elle part dans l’usine Melox d’Orano à Marcoule (Gard) pour produire, avec de l’uranium appauvri, un nouveau combustible, le MOX, utilisable dans 24 des 58 réacteurs français. Le reste est entreposé à la Hague : ce sont ainsi 61 tonnes de plutonium (dont 24 % en provenance de l’étranger) qui y demeurent, selon un rapport 2017 d’Orano… sachant que 4 à 8 kilos suffisent pour entrer dans la fabrication d’une bombe nucléaire. Une fois usé, le MOX, davantage radioactif, retourne à la Hague où il n’est pas retraité… et s’accumule donc à son tour.
Ici, faut différencier deux sujets :
- le plutonium séparé et purifié du combustible usé, donc qui peut se disperser facilement (en poudre) ou se voir détourné pour des usages militaires. Pour lui, on se contente d’entreposer le minimum nécessaire aux marges du procédé.
- le plutonium noyé dans le combustible usé, confiné au même titre que le combustible usé et inexploitable militairement sans retraitement préalable : son accumulation ne suscite pas de risque de détournement, et est donc bien moins litigieuse.
Pour le premier, je disais 40 tonnes, eux disent 61 tonnes dont 15 qui appartiennent aux clients étrangers, on est dans les clous.
Pour le second, c’est par le multi-recyclage, probablement en réacteurs à neutrons rapides, qu’on prévoit de le gérer – même s’il n’est pas exclu que le MOx usé finisse simplement comme déchet ultime, cette possibilité est envisagée dans la conception de Cigéo (on essaye de tout anticiper !)
3 à 4 % de résidus hautement radioactifs : ces déchets ultimes sont vitrifiés et l’immense majorité est entreposée « temporairement » dans l’usine d’Orano, en attendant de trouver une moins mauvaise option (l’Andra voudrait les enfouir dans son centre Cigéo, à Bure, un projet très contesté).
Bon, ben là, ils nous expliquent que 3 ou 4% du combustible finit sous forme de déchets
Après nous avoir dit qu’il n’était recyclé qu’à 1%.
Mouais 😉
Et là… Mince, alors, les capacités d’entreposage des déchets sont saturées aussi ?
La capacité d’entreposage de colis de déchets vitrifiés est elle aussi proche de la saturation, malgré la mise en service d’une fosse supplémentaire en novembre 2017. « La saturation des entreposages actuels de colis CSD-V devrait être atteinte fin 2021 », alertait ainsi l’IRSN dans son rapport 2018 sur le cycle du combustible nucléaire en France.
De manière très originale, une fois de plus, suffit de lire la source. On agrandit la capacité à raison de 4 ans de production tous les 4 ans.

En vérité, on est sur du flux tendu, et la saturation a déjà été atteinte une fois, avec des autorisations exceptionnelles à obtenir pour entreposer des colis dans des installations à la base pas prévues pour.
L’IRSN et l’ASN ont déjà averti à ce sujet. Il va donc falloir dégager des marges pour éviter de se retrouver à devoir par moment arrêter de vitrifier par manque de place pour les colis.
Parce que ça voudrait aussi dire des arrêts de tout le traitement, et donc des piscines qui se videraient moins vite, donc tendraient d’autant plus vite vers la saturation ^^’.
Bref, plus que des problèmes, parce que y’a rien de bloquant devant nous, je parlerais davantage d’enjeux pour garder ou récupérer des marges, anticiper le mieux possible et éviter, justement, les problèmes.
95 à 96 % d’uranium de retraitement : il est sorti de la Hague et est acheminé à Pierrelatte, sur le site de Tricastin, pour y être entreposé. Cet uranium de retraitement, davantage radioactif que l’uranium naturel, est théoriquement réutilisable. Dans les faits, il n’est pas réutilisé.
L’uranium de retraitement, il est théoriquement et en pratique réutilisable, puisqu’il l’a été plusieurs années sur 4 réacteurs, et cette pratique devrait reprendre dans le courant de la période 2020-2025.
EDF aspire à produire jusqu’à 15% de l’électricité nucléaire française à partir d’uranium de retraitement enrichi, qui viendront s’ajouter à 10% déjà produits à partir du MOx. Un quart de la production électronucléaire viendrait alors de matières recyclées. Pas mal !
Hormis les déchets vitrifiés, ces quantités de produits radioactifs qui s’accumulent sur les 300 hectares de l’usine de la Hague ne sont officiellement pas considérées comme des déchets mais comme des « matières valorisables » ; un soi-disant trésor énergétique qui n’est en réalité pas valorisé, que ce soit pour des raisons financières, technologiques ou industrielles. Si on s’en tient à leur utilisation actuelle, elles constituent bien des déchets radioactifs qu’il faudra gérer comme tels.
De mieux en mieux : cette fois, c’est leur phrase précédente qu’il suffit de lire pour les contredire : sur toutes les matières qu’ils évoquent, on a 95 à 96% « sorti de La Hague ».
Quant au MOx usé, oui, comme je l’ai dit, il est possible qu’il finisse un jour classé comme déchet.
Notamment si leur politique de lutte contre le recyclage aboutit. C’est très Greenpeacesque, ça :
- dénoncer un risque (« on risque de devoir classer en déchets le MOx ! ») ;
- essayer de causer le problème associé à ce risque (s’assurer qu’on ne puisse rien faire du MOx)
- dénoncer le problème tout en se gratifiant de « on vous l’avait dit ! »
Néanmoins, tant que son retraitement n’est pas exclu, il demeure classé comme combustible usé, et donc une majorité de « matière valorisable ».
Que ça déplaise à Greenpeace, que l’on puisse recycler davantage (paye tes écolos…), n’y change rien.
Ce billet est déjà très long, alors je vais écourter…
Il s’attaquent ensuite aux rejets.
J’ai déjà évoqué ce sujet là, avec les chiffres sur les doses que ça implique sur les populations.
Et le principe des études d’impact des rejets radioactifs, je l’ai narré là.
Il est également possible d’aller lire les pages consacrées à l’usine de La Hague dans le dernier Bilan de l’état radiologique de l’environnement français de l’IRSN (2015 à 2017).
Dans tous les cas, Greenpeace se contente de « il y a » sans la moindre analyse, sans la moindre donnée chiffrée : ça n’a aucune valeur.
Les « 20 000 fois plus que » ça n’est pas une unité de mesure du risque.
Et concernant le marquage en radionucléides, et notamment en traces de plutonium et d’américium, des alentours immédiats des usines et notamment de cours d’eau, y’a pas de quoi s’inquiéter de conséquences pour la santé.
Les questions que ça soulève, très légitimement, c’est « d’où ça vient ? »
Parce qu’une pollution très faible, c’est pas bien grave… Mais s’il n’est pas censé y en avoir du tout, faut enquêter sur la défaillance, qui peut cacher quelque chose de plus grave.
Mais bon, en l’occurrence, on a de très très très très très forts soupçons visant l’accident de 1981 (incendie d’un silo de déchets de l’époque d’UP2-400 et les réacteurs graphite).
Ensuite, ils tapent sur le Centre de Stockage [de déchets] de la Manche, exploité par l’ANDRA, mais ils n’ont pas l’air d’avoir grand chose à dire, en fait. « Y’a des trucs qui inquiètent », en résumé, sans guère plus d’infos. Venant de Greenpeace… Ça vaut Greenpeace. Passons.
Ensuite ils se plaignent des transports, et j’ai pas envie de m’embourber dans ce sujet : le combustible usé et les déchets, c’est du transport essentiellement ferré on ne peut plus sûr, et quelques km de transport routier entre Valognes et l’usine, sous bonne garde. Le plutonium séparé, c’est par voie routière, à raison de 10 tonnes par an environ.
Aucune analyse, aucune contextualisation, Greenpeace incarne vraiment la perte de temps, sur ce sujet.
Si vous voulez creuser un peu, j’évoque pas mal la question des transports dans la première partie de ce thread :
Enfin, une conclusion très travaillée : « ça veut dire qu’il faut sortir du nucléaire ».
Les gars, on sait que chez vous, TOUT veut dire ça. TOUT.
Vous avez montré des risques de saturation des capacités d’entreposage et une panne sur une pièce qui a conduit à arrêter une usine…
Et là PAFconclusion : le risque est MAJEUR pour tout le Cotentin. Mieux : POUR LE PAYS ENTIER.
Et puis la conclusion de la conclusion : « il est encore temps d’agir pour éviter le pire. »
On parle de Greenpeace. « Le pire va arriver », c’est la base de leur discours. L’hypothèse. Donc j’ai bien envie de rajouter un point « circulaire » à la liste. Ou un point pétition : je ne comprends pas bien la différence, dans ce contexte…


Et évidemment, je vous fais grâce du point terreur tant il est évident.
M’enfin.
Greenpeace France, je vous remercie pour l’effort de sourçage, et les sources en général sérieuses, continuez comme ça.
Prochaine étape : la rigueur dans le propos.
Allez, zou. Bonne soirée à tous 😘
Très interressant. Merci.
Savez-vous d’où provient le plutonium pour la dissuasion si ce n’est plus issue des REP français? Il y a des réacteurs de recherche dédiés?
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Je n’ai jamais eu de doc entre les mains l’indiquant clairement, ce sont plutôt des on-dit : à ma connaissance, la France ne produit plus de plutonium de qualité militaire. Elle se contente de recycler périodiquement ses stocks historiques pour séparer les isotopes et récupérer un plutonium de qualité fraîche.
Par contre, on renouvelle régulièrement nos stocks de tritium et, je suppose, d’uranium très enrichi.
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[…] beaucoup les antinucs en ce moment (« Les déchets nucléaires débordent ! »), on a déjà fait un point sur ce sujet ici.On est pas au débordement, mais bien remplis. Et sachant qu’on ne retraite pas au même […]
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[…] Sur d’autres attaques courantes des antinucléaires à l’encontre de l’usine, le premier billet de ce blog. […]
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