Dans un documentaire diffusé en prime à la télévision, portant sur l’économie du nucléaire, on a pu entendre Nicolas Hulot dire que la France réceptionnait des déchets nucléaires étrangers, officiellement temporairement. Mais, qu’en raison d’un contentieux avec le Japon, on serait condamnés à garder à notre charge les résidus radioactifs appartenant au Japon.
En effet, le retraitement en France de combustible nucléaire étrangers est une pratique presque aussi ancienne que le retraitement lui-même.
Depuis 1991, la loi française impose que les déchets issus des combustibles usés étrangers soient retournés dans le pays d’origine. Mais pour les contrats antérieurs, et bien, ça dépendait des contrats, s’ils incluaient ou non une clause de retour des déchets.
Ainsi, la France a traité dans les 1600 tonnes de combustible étranger (réacteurs à eau légère, eau lourde, graphite, réacteurs de recherche…) sans clause de retour de ces déchets, donc dont le retour doit être négocié à posteriori, en raison de la loi.
C’est à rapporter à environ 13 000 tonnes de combustibles étrangers traitées en France et 25 000 tonnes de combustible français (borne inférieure, si je n’en ai pas oublié en route), pour relativiser.
Mais voilà, ça fait bien des déchets qui appartiennent à des pays étrangers à qui on avait dit qu’on gardait les déchets avant de changer d’avis suite à une évolution du cadre législatif. Donc faut re-négocier à posteriori.
Les déchets de haute activité, on a commencé à les retourner aux clients étrangers à partir de 1995. On a commencé par le plus pénible et ce qui prend le plus de place, et en fait, on a déjà quasiment fini : de quoi se plaint Hulot ?
Et, dans l’absolu : si y’a un pays qui pose problème dans cette histoire, ben c’est la France qui veut changer les contrats des années après. Donc c’est normal qu’il y ait des négociations, parfois des litiges, des contrats et des accords entre gouvernements à re-faire.
Hulot est prompt à dire qu’on est « la poubelle du monde » comme si on allait violer la loi française, les directives européennes et les accords internationaux, mais ça a l’air de l’emmerder qu’on doive discuter avec les clients pour faire les choses proprement ? Que veut-il ?
D’autant plus que, on l’a vu, on a déjà retourné à quasiment tout le monde les déchets de haute activité. Il n’y a que pour l’Italie qu’il y a un point d’interrogation : 67 colis dont le retour n’est pas encore programmé.
Et concernant les déchets de moyenne activité, tout ce qui n’a pas été retourné, il est déjà prévu de le renvoyer. Sachant qu’on n’a commencé qu’en 2009. Exception toutefois, encore, pour l’Italie.
Qu’en est-il du Japon à qui Hulot s’en prend un peu facilement ? Il y a deux usines en service à la Hague. Ce sont eux qui ont financé une grande partie de l’une de ces deux usines ! Et ils ont construit une quasi-jumelle chez eux.
Donc vous comprendrez qu’il est difficile d’imaginer qu’ils refusent les déchets qu’ils ont eux-même demandé à produire et produisent eux-mêmes. En fait leur cas est simple : on a commencé à retourner les colis compactés en 2009, et en 2011, paf, Fukushima. À la suite de quoi ils ont opéré un nécessaire chamboulement de leur organisation de la sûreté nucléaire, en passant d’un régulateur très conciliant à une autorité implacable. Et il n’y a pas que les réacteurs qui prennent cher. Ils doivent aussi mettre à de nouvelles normes draconiennes les bâtiments d’entreposage des déchets. Par exemple. Au hasard.
Du coup, à mon avis, ils ne font pas de difficultés, je doute qu’il y ait contentieux, je pense juste qu’ils demandent du temps. Et je ne serais pas surpris qu’Orano la Hague soit très satisfaite de se faire payer pour entreposer les déchets plus longtemps. Autant les Hautes Activités, ça bouffe de la place, autant les Moyennes Activités, ça s’entasse bien.
À mon avis, si contentieux il y a, c’est avec l’Italie. Du coup, Monsieur Hulot, pensez à remercier les antinucléaires très forts chez eux 🙂
Pour transférer des colis de déchets entre pays, il faut définir une spécification des colis entre les clients et les autorités de sûreté. Pour les déchets de haute activité, ces spécifications existent avec la plupart des pays. Instruction en cours en Espagne. Et… Le processus est lancé en Italie. C’est déjà ça, mais il serait temps ! Donc Hulot a peut-être raison en mentionnant des contentieux, mais :
- Cible le mauvais pays, je pense
- Se trompe quand même quand il dit que les déchets vont rester en France
Et pour les moyenne activité, spécification approuvée en Belgique, Suisse, Pays-Bas, Allemagne ; processus en cours pour le Japon, l’Espagne et l’Italie.
À noter que l’Italie n’apparaissait pas dans les contrats « sans clause de retour », donc dans leur cas, il a toujours été question de leur retourner les déchets. Et les accords inter-gouvernementaux prévoient fin 2025 au plus tard.