Cycle #1 Terminologie, vocabulaire, définitions, unités…

Retrouvez le thread initial ici.

On va s’échauffer avec quelques définitions toutes bêtes mais qu’il faut vraiment avoir en tête pour bien se comprendre. Qui serviront, de plus, lorsque l’on causera déchets.

Matières et déchets radioactifs

Assimiler et faire la différence entre matière et déchet radioactif, c’est capital.
Je ne vais pas vous expliquer « radioactif », hein 😊 !
Mais il faut savoir que ce qu’on appelle matière, ce sont les substances radioactives dont on prévoit ou envisage un usage futur. Tout ce qui est uranium, plutonium, notamment, c’est soit utilisable aujourd’hui, soit dans le futur, moyennant des technologies que l’on connait mais que l’on n’a pas mises en œuvre.

C’est important, parce que les écologistes dénoncent souvent l’« oubli » de l’uranium appauvri, par exemple, quand on parle de déchets. Mais dans la mesure où l’on peut le recycler en partie, éventuellement le ré-enrichir, et, moyennant surgénération, le réutiliser intégralement…
➡️ Matière, pas déchets.

Au contraire, pour ce qui est des « déchets », aucune réutilisation n’est prévue ni envisagée. On peut éventuellement leur appliquer des traitements (purification, conditionnement…) après quoi on parle de « déchets ultimes ». Mais dans le vocabulaire nucléaire, on ne parle pas de « recycler les déchets », c’est totalement oxymorique ! Parce que les déchets, c’est, par définition, ce dont on ne peut plus rien tirer d’utile.

Surgénération

Mentionnée juste au-dessus, c’est une pratique qui permettrait de recycler intégralement les matières nucléaires comme l’uranium et le plutonium. Ça sera le sujet du dernier article de cette série (mais le thread est disponible en avant-première 😜), mais on en a déjà eu une mise en bouche sur ce blog.

Entreposage et stockage des déchets

C’est très simple. Dans le nucléaire, un « entreposage », c’est temporaire. Un « stockage », c’est définitif. L’entreposage, c’est votre poubelle, c’est la benne à ordure dans la rue ; le stockage, c’est la décharge, ou le dépôt des cendres de l’incinérateur.

Corollaire : les piscines de stockage n’existent pas. Aucune piscine n’a vocation à être un exutoire définitif pour les déchets, ce sont des piscines d’entreposage. D’ailleurs, à quelques détails près, ce qu’elles contiennent ne sont même pas des déchets, mais du combustible usé – on y reviendra.

Autre corollaire : Cigéo n’est pas temporaire. Cigéo est un site de stockage géologique. Il est prévu que ce soit l’exutoire définitif des déchets que l’on y mettra !

Le cycle du combustible

Ben oui, à parler de déchets, on en oublie le sujet : le cycle du combustible. Keskecé.

Alors déjà, on va jouer franc jeu : on se fait un peu des illusions en parlant de cycle. Des fois, on parle même de « cycle ouvert ». Ça pique un peu, et ça a de petits airs de greenwashing.
Mais bon, on parle bien de « combustible nucléaire » alors qu’il n’y a pas la moindre combustion en jeu… Les définitions, dans le nucléaire, sont rigoureuses, mais pour la logique, on peut en rediscuter.
D’ailleurs, vous vous souvenez de l’acronyme « REL » choisi pour parler des Réacteurs à Eau Légère, par opposition aux réacteurs à eau lourde ? >.<

Revenons à notre cycle.

Le cycle décrit l’ensemble des opérations que subit le « combustible » nucléaire, de la matière première jusqu’à sa gestion comme déchets, en gros.

On a donc une trajectoire d’un point A, la mine, vers un point B, le déchet, en passant par tout un tas d’étapes. Voilà le cycle. Vous admirerez la linéarité de ce cycle, donc x) 

L’explication du terme, c’est que sur un flux d’entrée de 100 tonnes de matière première, y’a environ 1,5 tonnes qui font deux fois un certain nombre d’étapes. Donc elles forment un cycle.

Et, historiquement, on ambitionnait de faire réaliser au moins un, voire plusieurs cycles, à une large partie de ce flux de matière, grâce à la surgénération.
Donc le terme de « cycle » était logique dans ce contexte.
Il l’est un peu moins aujourd’hui, mais il le redeviendra !

(J’espère)

La tonne de métal lourd

Je vais balancer pas mal de chiffres sur les flux de matières au travers du cycle, et il faut se mettre d’accord sur l’unité… On va parler en « tonnes de métal lourd ».

Notre problème, c’est que la matière nucléaire, elle change de forme chimique au cours de son cycle. Par exemple, elle est transportée sous forme d’U3O8 (octaoxyde de triuranium) mais en réacteur, elle est sous forme d’UO2 (dioxyde d’uranium).
Et la conséquence, c’est que pour une même quantité d’atomes d’uranium, on n’a pas la même masse d’U3O8 que d’UO2 ! Ou que d’UF4, d’UF6…

Du coup, la convention, c’est de ne compter QUE les noyaux d’uranium.

Comme si, à la pesée, on convertissait tout sous la forme d’un bloc d’uranium pur, métallique (formule chimique : U, c’est tout), qu’on pesait, et qu’après la pesée seulement, on transformait ça en U3O8 ou autre.

Et vu qu’on fait pareil pour le plutonium (et éventuellement le thorium) qui, comme l’uranium, est un noyau lourd qu’on « imagine » sous la forme d’un métal…

On appelle ça des « tonnes de métal lourd », abrégé tML.

Des fois, on parle même de « tonnes de métal lourd initial » (tMLi).
Parce que, lorsque l’on récupère les produits de fission, on sait qu’ils viennent initialement de noyaux lourds.
Par exemple, si vous avez 100 tML d’uranium initialement, dont vous fissionnez un quart… Vous finissez avec 75 tML d’uranium, et un reste de produits de fission qu’on ne sait pas comment compter.
Et bien on compte, dans ce cas leur masse avant fission : 25 tonnes de métal lourd initial.

Contexte

J’ai, avant d’entrer dans le vif du sujet, deux remarques préalable à faire.

Premièrement, je vais me placer dans le cas très particulier de la France. Retraitement et recyclage, en particulier, ne sont pas du tout la norme dans le reste du monde, mais sont d’énormes aspects du nucléaire en France.

Deuxièmement, je dois bien l’avouer, je vais surtout détailler ce qu’on appelle « l’aval » du cycle, l’après-réacteur.
Parce que tout ce qui se passe avant enrichissement, c’est l’uranium naturel, c’est surtout de l’industrie chimique, pas vraiment de l’industrie nucléaire. Et ça m’intéresse moins, tout simplement, et donc je ne connais que peu !

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