#AntinucléairesVSclimat : « Transition énergétique : l’Allemagne montre la voie ! »

Thread initial par @Astrochnis :

Les passages en italique sont les retranscriptions exactes des propos de l’auteur de ce thread. Les passages en caractères romans sont mes propres ajouts et commentaires, dont je vais minimiser le nombre pour ne pas dénaturer le propos initial.

À en croire le Réseau Sortir du Nucléaire, l’Allemagne aurait baissé ses émissions de GES grâce à la baisse du nucléaire, et grâce à l’essor du renouvelable, avec de très jolis graphiques sur la gauche, et que donc l’Allemagne serait un modèle à suivre. Sans vouloir vous spoiler le truc, il semble qu’ils confondent corrélation et causalité.

Regardons les chiffres bruts. Si j’en crois [Eurostat], les émissions totales de GES sont de [1264] MtCO2 en 1990 et [927] MtCO2 en 2014.
Ensuite, ils mettent en corrélation un baisse d’une valeur absolue avec les évolutions de valeurs relatives. Grosse erreur!!!

On ne compare jamais une valeur absolue à une valeur relative, sauf si le dénominateur de la valeur relative reste inchangé ! En plus, les émissions de gaz à effet de serre ne viennent pas toutes de la production d’électricité, mais aussi de l’industrie, du transport, du logement.Bref, Sortir du Nucléaire sombre déjà dans le délire. Mais admettons qu’ils puissent avoir une bonne intuition et regardons, correctement, les valeurs absolues. Je suis donc allé sur Eurostat chercher les émissions de GES dues à la production d’électricité de l’Allemagne (en MtCO2)et les productions électriques nucléaires et renouvelables (en TJ). Toutes les données viennent d’Eurostat, histoire d’avoir les mêmes sources [qu’eux]. Et voici les courbes :

Est-ce que vous le voyez le lien entre baisse du nucléaire et baisse des émissions de gaz à effet de serre DUES A LA PRODUCTION D’ÉNERGIE? Non. Et le lien entre cette baisse et la hausse des renouvelables? Non, plus.
Si j’étais taquin, je dirais même que plus le rythme d’installation de renouvelable augmente, moins les émissions de GES diminuent…

Passons à la partie droite de l’infographie. Ici, je tiens à remercier @NicolasMeilhan et son billet, qui m’ont permis de découvrir le document que je vais vous présenter.
Il s’agit d’une figure d’un des rapports de l’Institut Boell, concernant le charbon en Allemagne. Qu’est-ce que l’Institut Boell ? Il s’agit d’une fondation politiques, rattachée à un parti politique allemand, Die Grünen , soit EELV chez nous. Donc une fondation politique écolo.

Voyez la courbe ci après. Elle représente toutes les centrales à charbon et lignite prévues en Allemagne. En bleu et vert, celles dont la construction a été arrêtée, ce qui correspond au nombre de 6 donné par Sortir du Nucléaire, en effet. Par contre, en jaune, orange et rouge, celles dont la construction est prévue, celles en construction, et celles dont l’exploitation a commencée entre 2012 et 2015. Avec notamment la centrale de lignite de Neurath, exploitée depuis 2015 avec une puissance équivalente à la centrale de Fessenheim…

Alors quand @sdnfr dit qu’il n’y a pas eu de nouveaux chantier de centrales à charbon, comment dire, c’est assez contestable. Lien vers le rapport de Boell.

Pour la dernière partie de l’inforgraphie, je ne vais pas trop m’étendre sur le fait que le nucléaire N’A PAS été remplacé par le renouvelable, j’en ai déjà parlé :

Dernier point. Le Réseau SdN dit que l’Allemagne montre la voie. Quand on lit le dernier rapport du GIEC et qu’on compare les émissions des deux mix électriques, on aurait plutôt tendance à dire que l’Allemagne montre une voie sans issue.

Crédit ElectricityMap

#AntinucléairesVSclimat : « Économies d’énergie + renouvelables = nucléaire arrêté + climat protégé ».

Thread initial par @altern_is :

Les passages en italique sont les retranscriptions exactes des propos de l’auteur de ce thread. Les passages en caractères romans sont mes propres ajouts et commentaires, dont je vais minimiser le nombre pour ne pas dénaturer le propos initial.

Un petit rappel, comme toujours (oui, le thread va commencer, c’est bientôt la fin des bandes-annonces).

Alors mes petits amis, nous ici on va s’intéresser à la fiche suivante. 
Vous allez me dire : ‘Oh mais le petit malin, il a déjà traité le sujet !’. Bah ouais. Je vous ai dit que j’avais pas de temps
😎.

Passons outre le chapeau si vous me le permettez et intéressons-nous à la phrase « Le pays le plus nucléarisé au monde peut remplacer le nucléaire sans surcoût ». Alors même si j’invalide cette phrase dans un de mes threads (infra), allons un peu plus loin.

Nos amis de SdN nous disent que c’est l’ADEME qui dit que ‘produire l’électricité de la France en 2050 100% EnR = pas + cher que garder 50% de nuc’ « Dont l’ADEME sous-estime pourtant le coût ». Les saligauds. Allons donc gentiment fouiller dans ledit rapport.

Déjà, en page 5 du rapport, on trouve la phrase suivante :
« nous n’ignorons pas l’enjeu que représente la gestion de la stabilité du réseau, qui n’est pas traité dans l’étude. »
Bon, ça sent pas très bon, mais continuons.

On a beau fouiller le rapport on ne trouve pas explicitement le constat cité par SdN. Mais à la page 14, nous avons une comparaison du coût de l’énergie (€/MWh) pour différents scénarios EnR. Et on voit 100% EnR (réf.), 95% EnR, 80% EnR, 40% EnR… Ah, serait-ce le fameux 50% nucléaire dont parle SdN ? Considérons que c’est le cas.

Ainsi on voit qu’entre le 100% et 40% EnR, le prix est varie de 2€. Donc oui, le rapport dit ceci si l’on considère que le 40% EnR est le 50% nucléaire.

Mais quel est la différence de prix entre le 100% EnR et si on gardait notre parc nucléaire à 75% ? Soyons joueurs et allons plus loin : qu’est-ce qui coûte plus cher entre construire un parc 100% EnR et 100% nucléaire ? C’est ça qui est réellement intéressant !

Pour faire la comparaison, on va utiliser… une règle de 3 ! Ça va me changer de mon quotidien et tout le monde est capable de la faire :-). Pour simplifier, on va faire un 100% nuc’ vs un 100% éolien. 

Certain vont objecter « Oui mais les autres EnR », mais ça ne change pas le fond du calcul.

  • Le nucléaire a un facteur de charge de 80%. L’éolien 20% (Source : Allemagne). Facteur 3-4.
  • La durée de vie d’un réacteur est de 60 ans. L’éolien dure 20 à 30 ans. Facteur 2-3.
  • Le réseau reste inchangé avec un nucléaire à neuf. Pour l’éolien, l’Allemagne nous a montré (et ils étaient pas super fiers) qu’il faut mettre 0,5 à 1 fois le prix d’une éolienne par éolienne dans le réseau. Facteur 1,5-2.
  • Le stockage sur le 100% nucléaire est de l’ordre de 10% de la production. Pour l’éolien, 50-60%. Facteur 2. Sans compter l’expropriation.
  • Je prends un facteur 2 ici car je considère que l’investissement en stockage n’est pas linéaire. Je pense que c’est un peu sous-estimé, mais bon.
  • D’ailleurs pour les petits malins du fond, faire du stockage intersaisonnier sur batterie pour une maison, c’est un investissement égal au prix de la maison.
  • Le nucléaire coûte 3-5k€ le kWh. L’éolien 1,5 k€. Facteur 0,3-0,5.

Au final, on se retrouve avec un facteur 10-20 entre le 100% nucléaire et le 100% éolien et par extension EnR.

Par extension, en prenant l’argumentaire de SdN, passer à 40% EnR coûte toujours 10 à 20 fois plus cher que le 100% nucléaire. Merci SdN de confirmer indirectement que passer à 50% de nucléaire est une ineptie 😍 !

Passons à la suite. D’après l’IAE, « c’est l’efficacité énergétique qui pourra assurer d’ici 2030 50% des réductions des émissions de CO2 ».
Oui, ok, si on produit moins d’énergie carbonée, on pollue moins, ça me paraît logique. Mais je ne vois pas le rapport au nuc’ s’il y en a un.
En fait, le reste de l’affiche parle de la réduction de la consommation d’énergie, en citant Ecofys, sur lequel je n’ai pas grand chose à dire et négaWatt, dont on reparlera du scénario un autre jour promis car il faut voir ce qu’ils appellent « en améliorant notre qualité de vie ».

Au final, que retient-on ? La première phrase est factuellement fausse et justifiée par un argument valide en soi mais qui est hors sujet dans le débat qu’ils veulent mener.
Leur argument se retourne même contre eux : on a vu que passer à 40% d’EnR coûte 10 à 20x plus cher qu’un tout nucléaire en se basant sur l’étude de l’ADEME.
Mais je reste critique sur l’étude de l’ADEME que je soupçonne de ne pas scaler correctement le réseau avec la proportion d’EnR, ce qu’ils avouent en préambule de leur étude et qui est un biais considérable (cf. 0.5 à 1 fois le prix d’une éolienne par éolienne).
Un 40% EnR coûterait donc moins que 10 à 20x plus cher, mais 5 à 10x est déjà trop.
Voilà, c’est tout pour moi, je retourne travailler avant de déclencher un incident diplomatique avec ma boss ! Portez vous bien et surtout lisez les autres threads
😉 !

#AntinucléairesVSclimat : « Face au danger climatique, multiplier les dangers nucléaires ? », 2/2.

Première partie.

Thread initial :

On se remet l’image complète juste là, on s’est déjà payés la première moitié, attaquons la deuxième.

« 300 000 tonnes de combustibles nucléaires usés accumulées dans le monde »

Vrai ? Et bien… Je n’en sais rien.
Je ne sais pas si on parle de tonnage sur la balance, de tonnage en métal lourd, de tonnage avec les conteneurs… Y’a pas grand chose à tirer de ce nombre, en fait. Alors je ne vais pas chercher à savoir s’il est vrai.
Je vais simplement rappeler que ce sont des déchets solides, sagement entreposés sans difficulté particulière en attendant une solution de stockage (ie. définitive) fiable.

Et on va admettre cette masse de 300 000 tonnes et la relativiser un peu :
C’est environ 10% de la masse de dioxyde de carbone rejetée directement dans l’atmosphère en 2017.



Par l’Islande.

60 ans de déchets nucléaires mondiaux, c’est la même masse que 36 jours de CO2 en Islande.

C’est aussi la masse de 5 minutes d’émissions mondiales de CO2 en 2017 (à noter que je ne parle QUE de CO2, et pas de l’ensemble des gaz à effet de serre).
Huit heures d’émissions de CO2 françaises.

300 000 tonnes dans le monde : ce n’est rien.

L’enfouissement, à présent : un fiasco, qu’ils nous disent, en Allemagne et aux USA.

J’ai cru qu’on allait pouvoir écarter très vite le sujet USA, en disant qu’il y’a eu des incidents, sans gravité, et après quelques années d’arrêt du stockage, les activités de celui-ci ont repris.
Mais en faisant des recherches, je me suis rendu compte que nos amis de Sortir du Nucléaire avaientt quand même réussi à dire n’importe quoi en parlant d’incendie.
Le site de WIPP, aux USA, a, en effet, subi un incendie d’un camion de transport de sel (le site étant aménagé dans des cavités creusées dans le sel).
Ceci a eu lieu dans une zone du site dédiée à des expérimentations et des recherches,en l’absence de tout déchet radioactif. Aucune contamination, aucun rejet radioactif donc, juste des fumées normales de camion qui brûle.
Six travailleurs ont été d’ailleurs hospitalisés en raison de l’inhalation de fumées, mais ont pu quitter l’hôpital le lendemain.
Incident mineur, donc.

Et, dix jours plus tard, dans une autre section du WIPP qui, elle, abritait des déchets, il y a eu un accident d’endommagement d’un colis et de relâchement de radioactivité, d’émetteurs alpha, spécifiquement.
Cet événement là, sans aucun lien avec l’incendie, a effectivement valu une faible contamination interne à 21 employés.
En dehors de ces personnes, les doses modélisées de manière pénalisante sont de 100 µSv max sur site, 10 µSv max hors site.
10 µSv, c’est le centième de la dose maximale admissible pour le public en France pour les activités industrielles. Et cette dose maximale est d’un facteur 100 inférieure aux doses que l’on sait représenter un potentiel danger (les marges raisonnables, tout ça).
100 µSv, c’est 5 millièmes de la dose maximale annuelle admissible pour les travailleurs « catégorie A » exposés à la radioactivité en France.

Bref, du point de vue des conséquences hors site, c’est nada, et pour les 21 contaminés, les niveaux de contamination inquiètent peu et ils seront de toute manière très surveillés.

On parle donc là d’un accident assez mesuré finalement – d’ailleurs, s’il a certes fallu 3 ans pour nettoyer la contamination d’une galerie, les activités de stockage ont depuis plus d’un an repris au WIPP.

L’Allemagne et la mine d’Asse, à présent… J’avoue moins connaître le sujet.
Mais Asse illustre tout ce que n’est pas Cigéo :
stabilité géologique déjà compromise à l’aube du projet ;
mine de sel réaffectée plutôt que site prévu et conçu pour le stockage ;
infiltrations d’eau alors que le seul avantage du sel aurait du être la protection contre l’eau ;
déchets entassés sans plus de subtilité, parfois littéralement balancés en vrac.

J’ignore si elle est authentique, mais cette image revient très souvent à propos de la mine d’Asse. Si elle est bonne, ça donne le ton. On la trouve par exemple dans un dossier du journal allemand Der Spiegel consacré à Asse :

Par ailleurs, le stockage y a commencé en 1965, peu avant que nous ne commençions à stocker nos déchets au Centre de Stockage de la Manche, lequel ne pose pas un millième des problèmes d’Asse.
Donc déjà un peu d’avance de la façon de faire « à la française » dans les années 60, qui ne peut que s’être accrue depuis – entre autres grâce au retour d’expérience d’Asse.

Centre de Stockage de la Manche en cours de fermeture

L’Allemagne nous offre, une fois n’est pas coutume concernant le nucléaire, un très bon exemple… De ce qui ne sera plus fait avec les déchets radioactifs.

Quelques rappels sur le concept de Cigéo et ses multi-barrières de confinement :

Et puis, tout simplement, un dernier tacle avant de passer à la suite… Le Réseau Sortir du Nucléaire parle de combustible usé, puis de deux sites de stockage où il n’est pas question de combustible usé (ni brut, ni retraité).

Bon, on ne va pas faire le tour de tout le sujet des déchets, on voit assez bien qu’ils l’ont bâclé, et vous avez mis plus de temps à lire ce que j’en dis qu’eux à l’écrire, à mon avis. Et j’vous parle pas du temps que moi j’viens d’y gâcher.
Reste la dernière partie de l’image. J’débats peu du nucléaire militaire, en général, alors on va aller très vite.

La citation d’Al Gore : bon gros cherry picking, on ne sait pas de quoi il parle, de quand, du contexte, du rapport avec son prix Nobel (argument d’autorité en rab), bref, fallacieux au possible.

Mais puisque ça parle de prolifération, j’ai été jeter un œil au traité de non prolifération. D’une part, sur ses non signataires : Inde, Pakistan, Israël. Et Soudan du Sud, mais… Bon. Pas un gros sujet, le Soudan du Sud et le nucléaire.

Côté Inde, le lien entre nucléaire civil et militaire est assez évident, au vu de leur goût pour les réacteurs à eau lourde, très bon producteurs de plutonium de qualité militaire.
Pakistan, c’est moins vrai, avec essentiellement des REP, mais, il est vrai, un réacteur à eau lourde aussi mis en service en 1971, donc un possible problème d’interférences civil/militaire.
Par contre, Israël, un seul réacteur et purement militaire. Donc trois exemples de problèmes liés à la prolifération, dont un met en tort les affirmations d’Al Gore, quel dommage !

Plus amusant encore, j’ai été jeter un œil au traité de non-prolifération. Sur lequel s’asseoit @sdnfr, puisqu’on y lit à la première page que les signataires approuvent…

« The principle that the benefits of peaceful applications of nuclear technology, including any technological by-products which may be derived by nuclear-weapon States from the developement of nuclear explosive devices should be available for peaceful purposes to all Parties to the Treaty, whether nuclear-weapon or non-nuclaire weapon States »

Pour les non-anglophones : est approuvé le principe que les applications pacifiques du nucléaire, y compris les dérivés du développement des armes, devraient être accessibles à toutes les parties du traité pour des usages pacifiques.

D’où le fait que Sortir du Nucléaire s’assoie sur ce traité.

Pour finir, à propos de l’encadré de gauche :
C’est justement le rôle du nucléaire militaire que de prévenir l’occurrence d’une guerre nucléaire. Je ne vous fait pas l’affront de vous exposer le principe de dissuasion que vous avez du apprendre au collège/lycée, vous.
« Sécheresse, désertification […] », etc., sont de très bonne raison de lutter contre le dérèglement climatique. Donc de recourir, entre autres, au nucléaire.

On termine donc ce thread comme le précédent : avec le Réseau Sortir du Nucléaire qui expose des risques qui conduisent logiquement à pousser un développement accru du nucléaire. Le risque d’un dérèglement climatique majeur.

#AntinucléairesVSclimat : « Face au danger climatique, multiplier les dangers nucléaires ? », 1/2.

Thread initial :

Bon, on va y aller tout doucement, en plusieurs fois, parce que c’est du très, très lourd, très, très dense. Comme du plutonium, et aussi toxique.

L’image est découpée en trois parties, alors je vais me contenter pour le moment de la première, la moitié haute.En plein centre : TCHERNOBYYYYL.

5 millions de personnes en zone contaminée

« En zone contaminée », ça ne veut rien dire. Des traces de retombées parfaitement inoffensives suffisent à parler de zone contaminée :
l’existence d’une contamination n’est pas un indicateur de risque.
Mais, soit, on ne peut nier que la légèreté des mesures de mitigation, et notamment les évacuations tardives et limitées, furent un énorme problème à Tchernobyl.
L’accident aurait été beaucoup moins grave avec une évacuation immédiate des zones à risque.

On a donc un exemple de ce qu’il ne faut pas faire, et donc qu’on ne ferait plus, cf. Fukushima. Un point positif, au final, même si au prix fort.

Par contre, le million de décès, c’est une énorme approximation. Et j’hésite à parler d’entubage. 
Le dénombrement des victimes de #Tchernobyl fait l’objet d’énormes débats, les chiffres sont très nombreux et assez disparates.

Un peu comme les modèles climatiques, par exemple, et c’est la raison pour laquelle, côté climat, la référence prise est souvent le GIEC, qui compile la littérature scientifique mondiale pour en tirer des tendances d’ensemble.
C’est également le même travail que produit l’UNSCEAR (United Nations Scientific Commitee on the Effects of Atomic Radiation), rattaché aux Nations Unies, sur l’étude des effets des expositions aux rayonnements ionisants.

Quelques chiffres issus de leur travail concernant Tchernobyl :
134 expositions à de fortes doses, conduisant à plusieurs dizaines de décès prématurés dans les premiers mois ou les années suivantes ;
530 000 personnes surveillées car ayant reçu des niveaux de radiation à risque stochastique (pas d’effets directs mais risque de contracter un cancer plus ou moins accru) ;
Près de 6 000 cas excédentaires de cancer de la thyroïde chez des enfants, nombre susceptible d’augmenter avec les années (évidemment de moins en moins). Cancer heureusement rarement mortel.

Personnellement, j’ai coutume de retenir, pour faire très simple et enveloppe de tout ça, « moins de 10 000 victimes », où victime n’est pas synonyme de « décès ». Ça permet de préserver l’ordre de grandeur de la gravité, sans minimiser l’événement, sans céder au drame démesuré.

Le million, alors, d’où vient-il ?

Ah, le soin porté aux choix de ses sources… Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait la Peur !

La source, ici, est une traduction d’un livre publié par trois sommités (sans ironie) scientifiques d’ex-URSS.
La traduction a été publiée par l’Académie des Sciences de New-York, mais pas en tant qu’étude revue par les pairs, nous explique la page Wikipédia dédiée au livre
Il s’agit donc bien d’un livre indépendant, pas d’une étude scientifique au sens habituel du terme.
Néanmoins, cinq revues de ce travail ont été effectuées depuis.

Si l’une salue le travail réalisé et appelle à une meilleure prise en compte des travaux des scientifiques de l’Est dans les études de l’Ouest, les quatre autres sont unanimes. Des méthodes aux conclusions, beaucoup de choses sont à revoir (en fait, elles ne sont pas si unanimes : elles ne sont pas tout à fait d’accord sur ce qui est le pire dans le travail réalisé ^^ »).

Si l’on est libre de mentionner cette source parmi d’autres, car tout n’est visiblement pas à jeter dedans et loin de là, en faire la seule référence parce qu’elle offre le plus grand nombre de morts possible est donc indiscutablement malhonnête.
C’est un peu comme se baser sur un livre d’Allègre pour causer climat, en contredisant tout en le négligeant le GIEC. Ça serait mal vu.

Au final, ce qu’expose le Réseau Sortir du Nucléaire est vraisemblablement plus loin de la vérité que d’affirmer, on le voit parfois, qu’il n’y aurait que 50 morts (le nombre de morts sur le coup).

On vient de faire le tour d’un élément de la première moitié d’une des images de l’infographie. Et c’est déjà long. Pfiou !
Mais continuons.

« Aucune autre source d’électricité, aucune autre technologie ne peut entraîner de telles conséquences qu’elles peuvent mettre en difficulté l’économie d’un pays entier »

Là, ça va aller très vite, car je pense qu’il n’y aura personne à convaincre : n’importe laquelle des énergies fossiles est susceptible de mettre en difficulté l’économie d’un pays entier dès lors que la ressource manque.
Que ce soit hier ou aujourd’hui, par des problèmes d’approvisionnement pour des raisons politiques ou économiques, ou, demain, pour des raisons de rareté de la ressource : que le gaz, le charbon ou le pétrole vienne à manquer, et l’économie prend très vite, très cher.
On pourrait aussi signaler qu’au-delà du seul aspect économique, les centaines de milliers de morts annuels du charbon dans le monde ont des conséquences terribles.

À ce sujet, une petite digression, ou j’essaye de mettre des ordres de grandeur sur les victimes de la catastrophe nucléaire de Fukushima-Daiichi. Et surtout, sur le nombre de victimes du charbon qui est venu en remplacement d’une partie du parc nucléaire nippon.

Ce thread a ses défauts, mais il remet un peu de perspective néanmoins : même à choisir entre du nucléaire et un accident, ou pas de nucléaire et davantage de fossiles, le choix n’est pas aussi évident qu’il en a l’air.
D’ailleurs, deux pays très engagés dans l’accroissement de la part du nucléaire dans le mix électrique sont… le Japon, qui veut vite redémarrer son parc, et l’Ukraine, qui souffre de sa dépendance au gaz russe.

Revenons à nos antinucléaires français.

Je pourrais parler des conséquences sur l’économie et bien d’autres choses du dérèglement climatique, vraisemblablement bien pire qu’un accident nucléaire pour de nombreux pays, mais… Je me garde ça pour plus tard.

Du coup, on passe à la suite :

« 6 millions de français à moins de 30 km d’une centrale »

Est-ce vrai ?
Pour commencer, j’aimerais souligner la beauté de la source : « Nature, 2011 ». Va retrouver quoi que ce soit à partir de ça.
Mais j’ai fait mes recherches, et j’ai trouvé des sources qui valident à peu près ce nombre. J’ai trouvé 7 millions, mais en comptant les voisins outre-frontières, donc on doit à peu près s’y retrouver.

Est-ce pertinent ?
Et bien… Pas vraiment. Tout au plus peut-on en déduire que 6 millions de personnes sont concernées par « le risque nucléaire » (en omettant les autres installations nucléaires : usines du cycle, recherche, entreposage ou stockage de déchets, militaire…).
Mais un accident toucherait sa population avoisinante, et non pas 6 millions de français. La centrale affichant la plus forte densité de population dans son voisinage (30 km) est la centrale du Bugey, avec 1,3 millions de français et étrangers aux alentours.
Ensuite, la pertinence du critère de 30 km est discutable : en France, les Plans Particulier d’Intervention sont dimensionnés à 10 km, en transition vers 20 km, et ce n’est pas sans raison.
30 km correspond à la distance maximale à laquelle des évacuations ont eu lieu à Fukushima, ce qui ne veut pas dire que tout le monde dans un rayon de 30 km a été évacué.
Il faut donc y voir une « limite haute » du nombre de personnes concernées. D’autant plus « limite » qu’à Fukushima, les rejets de radioéléments n’ont pas pu être filtrés avant envoi dans l’atmosphère, alors qu’ils le seraient en France, les installations étant équipées pour.

Est-ce une exclusivité nucléaire ?
De l’ordre de 1,3 million de français exposées à un accident industriel ?
Le barrage de Vouglans, très en vogue chez les antinucléaires en ce moment est susceptible de noyer une bonne partie de l’agglomération de Lyon, et donc concerne une large partie des 2,3 millions d’habitants de l’air urbaine lyonnaise.
Par ailleurs, diverses Installations Classées pour la Protection de l’Environnement, et sites Seveso, sont également susceptibles, en cas d’accident, de libérer de larges quantités de produits toxiques et d’exposer la population à des substances plus ou moins nuisibles (pensez donc à Bhopal…) selon un mode de propagation semblable à celui d’un accident nucléaire.
Concernant Vouglans et les risques nucléaires et chimiques de la vallée du Rhône, je vous recommande cet excellent thread :

« Coût de l’accident : 760 milliards d’euros selon l’IRSN »

Ce chiffre provient d’une étude de l’IRSN de 2007, portant sur « le plus extrême des accidents majeurs ».
Connaissant un peu l’IRSN, en lisant ça, j’imagine une fusion totale inexpliquée du cœur et rupture de l’enceinte de confinement permettant des rejets énormes, non filtrés, et précoces (-> peu de décroissance avant rejet).

Cette étude a été refaite en 2014, cette fois en supposant un « accident majeur représentatif ». C’est-à-dire qu’on n’étudie plus le pire physiquement atteignable, mais le pire éventuellement envisageable.
On descend à 430 milliards d’euros de conséquences économiques pour l’accident majeur (par opposition à « grave ») considéré par l’IRSN.
La nuance est donnée très clairement :

« Par convention de langage, l’accident dit « grave » comporte des rejets radioactifs importants, mais différés et partiellement filtrés, alors que l’accident dit « majeur » provoque des rejets massifs non filtrés. »

IRSN

Donc oui, si ce n’était pas clair : le Réseau Sortir du Nucléaire a préféré remonter à une étude de 2007, parce que celle de 2014, jugée plus représentative par ses auteurs, était jugée insatisfaisante par nos antinucs. Pas mal, hein ?

Bon, puisque j’y suis… L’IRSN expose le détail de ce nombre de 430.

En gros, 60 milliards d’euros d’impact radiologique, 110 milliards pour la perte de territoires contaminés, 90 milliards d’impact sur le parc nucléaire.

Et puis 170 milliards (40% du total !) de « coûts d’image » !
Les coûts d’image intègrent des pertes économiques diverses : non-vente de denrées ou biens de consommation pourtant sains, suite à un boycott, effets sur le tourisme, sur les exportations…
À mes yeux, ce sont des coûts qui sont imputables à la désinformation pratiquée par les vendeurs de peur. Je balance juste ça comme ça.

Maintenant, une nuance apportée par l’IRSN : « ces évaluations très élevées du coût d’un accident nucléaire sont à mettre en regard de probabilités très faibles d’occurrence de tels évènements ».
C’est le principe de l’évaluation des risques : plus les conséquences d’un événement sont graves, plus sa probabilité d’occurrence doit être réduite.

Et là, on parle d’un accident MAJEUR.
L’accident majeur à 430 milliards, tout est mis en œuvre pour qu’il soit proche d’être exclu. Établir un scénario qui aboutirait à un tel événement me semble bien requérir d’imposer un « ta gueule c’est magique » à quelques reprises.

Bref : Sortir du Nucléaire ne cherche évidemment pas à informer, une fois de plus, ni expliquer, ni sensibiliser : faire peur, et c’est tout.

Et pourtant… Ironiquement…
N’est-ce pas finalement un peu rassurant de voir que même pour eux, ce qui fait peur en cas d’accident nucléaire ultime, c’est l’impact économique ?

Bon. Dernière ligne droite : Fukushima-Daiichi.

Bonne nouvelle, les chiffres sont corrects ! À noter que 160 000, c’est le nombre d’évacués sur le coup, la moitié environ est rentrée depuis. Mais c’est quand même un bon nombre.

Et si des catastrophes non-nucléaires (climatiques, par exemple) ont déjà provoqué des évacuations pires que cela, ce ne sont jamais des évacuations durables, alors que là, indeed

Qui plus est, le nombre de personnes déplacées est indéniablement un indicateur pertinent, car les évacuations liées à l’accident de Fukushima-Daiichi sont la principale conséquence de l’accident sur les populations, en l’absence de conséquence sanitaire significative.

Par contre, la superficie contaminée n’est par pertinente, car la présence d’une contamination n’est pas un indicateur de risque : techniquement, le monde entier est contaminé par les retombées des essais nucléaires atmosphériques (on reboucle sur le début de cet article, là).
Plus simplement, les substances radioactives sont omniprésentes dans l’environnement du fait de la simple radioactivité naturelle (tellurique, cosmique…).
En pratique, dans l’étude de l’IRSN qu’on évoquait juste avant, les évacuations sont considérées à partir de 500 kBq/m² de contamination en Césium 137. 
Alors que les « 8% », c’est la superficie contaminée… À 10 kBq/m² ou plus !

Ce qui serait plus pertinent pour évaluer le risque serait la nécessité d’évacuer ou non – on en revient à l’autre nombre indiqué, seul ici ayant un intérêt. 

Enfin, le meilleur : 160 000 déplacés, est-ce inédit ?
Dans l’absolu : non. Suffit de penser aux guerres. 
Et en dehors de ça, sur des évacuations de courtes durées, ce n’est pas inédit non plus. Par exemple les évacuations avant un ouragan aux USA.
Autre exemple, lié au secteur de l’électricité cette fois : début 2017, 188 000 personnes avaient été évacuées quelques jours en Californie en raison d’un risque de débordement d’un barrage et d’inondation.

Cependant, une évacuation de plusieurs années d’une telle ampleur est probablement unique à ce jour.

Mais… Y’a un mais. Et on va finir en parlant climat, comme promis plus haut. 

Et ça devient amusant. Humour noir, par contre.
Le rapport SR15 du GIEC (celui publié fin 2018 sur le maintien sous 1,5 °C du réchauffement planétaire) mentionne qu’un réchauffement climatique global de 1,5 °C au lieu de 2 °C peut réduire de 10 millions le nombre de personnes exposées au problème de montée des eaux.

DIX FUCKING MILLIONS. 

Juste pour la montée des eaux, j’vous parle pas de désertification, de crises alimentaires, de pénuries d’eau !
Et comment l’obtenir, cette limitation à 1,5 °C ? Entre autres, elle requiert un recours accru… au nucléaire.
Lourdement accru.
Pas QUE à ça, évidemment. Mais à ça quand même.

Les risques nucléaires soulignés par les écologistes vous inquiètent ? Alors soyez rationnels, et… 

…Soutenez le développement nucléaire. Car les risques, quand ils ne sont pas déformés avec malhonnêteté, restent modestes devant le dérèglement climatique.
On est face à un risque MAJEUR, à la probabilité d’occurrence proche de 100%, global, multi-générationnel.
Faire la fine bouche pour des risques à la probabilité d’occurrence quasiment nulle, locaux, limités dans le temps

No way. Vous ne l’assumerez pas devant vos petits enfants.
Enterrez les « Sortir du Nucléaire », et tous les discours antinucs des membres de ce réseau. Laissez couler les écologistes politiques de l’ancien temps.

Forcez les Greenpeace, Réseau Action Climat, Fondation Nicolas Hulot, France Nature Environnement, France Insoumise, à abandonner leurs dogmes pour penser à l’urgence climatique. 

S’ils n’en sont capables, lâchez les aussi.

Si vous marchez pour le climat, marchez. Et laissez derrière les cadavres de ces politiques de l’ancien monde.

.

#AntinucléairesVSclimat : « Nucléaire : inadapté à un climat dégradé »

Thread initial par @Spades_libre :

Bon, on va commencer par le premier point. 

En cas de canicule, on module en effet la puissance des réacteurs. 
Pas pour des raisons de sûreté, mais pour respecter l’arrêté de rejet.
En gros, on a un circuit d’eau qui pompe depuis la source d’eau, on refroidit notre matériel avec, et on la rejette. 
N’ayant pas le droit de chauffer l’eau au delà d’une certaine valeur, si le débit du fleuve diminue on peut être amené a baisser la puissance.

Je vous cite : « cela conduit EDF a importer de l’électricité a prix d’or »

J’avais un peu de temps à perdre, j’ai été vérifier… Direction le site de RTE. Section sur les imports/exports. On peut choisir des dates, je pars de début juillet à fin août et j’obtiens ceci :

« Chef, le monsieur il dit que sur la période estivale on est exportateurs
– Ouais ben… Faut aller regarder les journées les plus chaudes »

Bon. Alors on va taper les journées les plus chaudes de l’été. Tiens, d’après météo France, y a eu une pointe de chaleur le 26 juillet. 

On refait un tour sur la moulinette de RTE…

Fun Fact: même sur les épisodes les plus chauds, la France exporte de l’électricité nucléaire vers son voisin allemand, la star européenne de l’éolien 😱
On a une belle marge… En été, la consommation électrique française est autour de 50 GW et pas loin du double en hiver. 
Même en baissant la puissance de quelques réacteurs en bord de fleuve en été on est loin de la déroute… (C’est aussi pour ça qu’on y programme des arrêts)

Bon… 
J’arrive sur le point suivant. Le nucléaire « consomme » beaucoup d’eau.
Pardon, j’ai omis d’être alarmiste. 
« Nom de dieu de bordel de merde! Vous vous rendez compte? Le nucléaire consomme de l’eau! On va tous mourir! »

Alors… 
1) Un réacteur nucléaire consomme en effet quelques m3 d’eau par seconde. Et il en rejette exactement la même quantité. On pompe, on refroidit nos matériels, et on rejette.
C’est ce que vous voyez en haut du gros machin gris ici.

2) Allez j’ose… 
La planète dont on se préoccupe, on la surnomme habituellement « planète bleue ». Vous savez pourquoi? 
Parce que de l’eau, on en a PLEIN.
Mais quel mauvais argument que de dire que le nucléaire c’est mal parce que ça consomme de l’eau.. 
On peut reprocher plein de choses à la filière nucléaire (déchets ou autre) mais la consommation d’eau?? C’est tellement pas significatif par rapport au cycle de l’eau mondial..

Je refais un saut eclair sur le point 1… 
Vous dites que 10 réacteurs ont été arrêtés a cause de la canicule.
Les journaux en comptent 4, vous auriez pas ajouté quelques arrêts déjà programmés pour grossir le chiffre ? 

Point suivant. 
« Les réacteurs auront soif »

(Bon les gars, je sais pas qui vous a dégotté vos titres mais ça va pas du tout là.)
Déjà, notons que sur votre dessin, aucun réacteur ne se situe sur une zone rouge, débit d’étiage diminué de moitié.. 

Mais comme on va le voir, vu les ordres de grandeur dont on parle, ça ne serait même pas gênant.

Une centrale, du point de vue sûreté, a besoin de peu de débit. 
Elle utilise des pompes (circuit SEC), débit de l’ordre de 2000 m3 par heure, soit moins d’un par seconde. 

Il y a quatre pompes par tranche (une seule suffit a faire le boulot).
Pour un site 4 tranches, le débit nécessaire est donc de l’ordre de quelques m3 par seconde.
Le débit actuel du Rhône pour prendre un exemple est de plus de 1000 m3 par seconde. 
Le débit d’étiage (débit le plus bas) est de plusieurs dizaines de m3 par seconde. 
–> on a de la marge avant de « crever de soif »

Je précise que je parle ici de débit nécessaire a la sûreté. Quand on en est là, on n’est plus en puissance, ce qui de toute façon ne serait pas problématique, cf plus haut.

Passons à la suite:

Cette fois, le problème serait qu’on a trop d’eau (décidément…). 

Si on émet trop de carbone, le niveau des océans monte, et on connaît la suite…  Quelle meilleure réponse à faire là-dessus que rappeler que selon le dernier rapport du GIEC
[SR15, le rapport spécial dédié aux moyens de tenir le dérèglement climatique sous 1,5 °C d’ici la 2100 paru dernier trimestre 2018], si on ne veut pas produire de carbone les scénarios proposés envisagent entre +50% et +500% de nucléaire.
Dites, , vous avez une remarque a ce sujet ?

En image, c’est mieux :

Je finis rapidement sur l’incident du Blayais, l’innondation de 1999. 
Incident classé au niveau… 2 de l’échelle INES (sur 7).

Et sur lequel un gros retour d’expérience a été entrepris au niveau du parc, ce qui est parfaitement normal.

#fin

Je me permets d’apporter quelques compléments.
Notamment quelques articles de la SFEN :

Ainsi que, davantage en guise d’anecdote, ce tout récent article sur le froid polaire frappant les USA, entraînant des menaces sur l’approvisionnement électrique en raison des pénuries de charbon ou gaz dans les centrales électriques… Que les centrales nucléaires regardent en souriant.

#AntinucléairesVSclimat : « Le nucléaire, c’est trop cher ! »

Thread initial par @AStrochnis :

Les passages en italique sont les retranscriptions exactes des propos de l’auteur de ce thread. Les passages en caractères romans sont mes propres ajouts et commentaires, dont je vais minimiser le nombre pour ne pas dénaturer le propos initial.

Il y a eu un erratum suite à certains propos erronés de ce thread, je le joins également en fin de billet.

Et moi, je vais m’intéresser d’abord à cette fiche-ci. J’ai déjà commencé hier avec le petit encart en haut à gauche.

En substance, le chiffre en lui même n’est pas complètement faux, mais il faut aller voir plus loin et lire l’étude en entier. Même avec ces surcoûts, le kW installé nucléaire est moins cher que le kW installé éolien et beaucoup moins cher que le kW installé photovoltaïque.
Et encore, on ne parle que de kW installé, c’est-à-dire qu’on ne parle pas de facteur de charge, ni même de renouvellement du parc. Je rappelle qu’une centrale nucléaire est prévue pour durer 60 ans (EPR) voire même 80 ans pour les centrales américaines.
L’éolien et le PV, c’est 20 ans. C’est-à-dire que les investissement, il faudra les réaliser 3 fois pour les ENR là où une seule fois sera suffisant pour le nucléaire.
Pour plus de détail, allez voir
⬇️⬇️

Maintenant intéressons nous au bas de l’infographie, dont les données sont tirées de l’étude Lazard 2017. Pour celles et ceux qui voudraient la voir, elle est disponible ici.

Il s’agit d’une étude réalisée par la banque Lazard sur les coût des différents modes de production d’électricité aux États-Unis, et uniquement aux États-Unis. La méthode est-elle applicable en France? À priori je dirai non, déjà pour une raison énoncée en page 3 de l’étude :

« Does not reflect decomissioning costs or potential economic impact of federal loan guarantees or other subsidies. Low and high end depicts an illustrative nuclear plant using the AP1000 design. »

Outre le fait que le démantèlement n’est pas compté (mais il ne l’est pour aucun moyen de production), le souci est que les réacteurs sont des AP1000, qui ne sont pas utilisés en France, et je ne suis pas sur que ces coûts soient utilisables tels quels. Mais ce n’est pas le pire.
En page 2, qui est le graphe représenté par 
@sdnfr, il est un petit incipit, qu’ils ont visiblement oublié de lire, et que je vous livre :

« Certain Alternative Energy generation technologies are cost-competitive with conventional generation technologies under some scenarios; such observation does not take into account potential social and environmental externalities (e.g., social costs of distributed generation, environmental consequences of certain conventional generation technologies, etc.), reliability or intermittency-related considerations (e.g., transmission and back-up generation costs associated with certain Alternative Energy technologies) »

Et oui, les jolis chiffres présentés par @sdnfr traduisent, une fois de plus, le coût d’énergie installée, et non réel. En prenant un facteur de charge de 23% pour l’éolien et de 70% pour le nucléaire, on passe à des fourchettes de 130 à 260 $/MWh pour l’éolien et 160 à 261 $/MWh pour le nucléaire. [Voir à ce sujet l’erratum en bas de page]

Je rappelle également que compte tenu des durées de vie, il faudra refaire certains investissement. Sur 60 ans par exemple, les investissement fixes (hors combustibles donc) seront faits une seule fois
[pour le nucléaire] contre trois fois pour le vent.
Ce qui donne donc un coût du MWh éolien trois fois plus cher que celui du nucléaire.

Je rappelle également que compte tenu des durées de vie, il faudra refaire certains investissement. Sur 60 ans par exemple, les investissement fixes (hors combustibles donc) seront faits une seule fois [pour le nucléaire] contre trois fois pour le vent.
Ce qui donne donc un coût du MWh éolien trois fois plus cher que celui du nucléaire.

Chers amis de @sdnfr, il va falloir apprendre à lire plus consciencieusement les études. J’espère que vous n’avez pas externalisé cette prestation, sinon vous vous êtes fait escroquer.

Dernier point, il est question également dans l’étude question d’émission de CO2 en comparaison avec des centrales à charbon (on rappelle qu’ils en prennent pas en compte l’intermittence). Ça me rappelle le rapport du GIEC sorti il y a deux jours, vous savez celui où divers mix électriques sont testés pour pouvoir contenir le réchauffement à 1,5 °C, dans lesquels certes les ENR croissent entre 40% et 70% par rapport à 2010, mais où également la part du nucléaire double voire quintuple. Une petite réaction @sdnfr?
Ou alors c’est comme pour le reste, vous faites du cherry picking sans vous soucier des hypothèses.

Ah oui, et concernant le graphe en haut à gauche de votre infographie, concernant les investissement.
C’est aussi de l’escroquerie intellectuelle.
L’investissement se fait parce qu’il y a un tarif de rachat garanti et un bénéfice garanti pour le client. C’est la subvention qui génère l’investissement. Arrêtez les subventions, et vous verrez qu’on investira beaucoup moins dans les ENR.

Et sinon, [dans le prochain thread/billet] je reviens vous parler d’une autre de leurs fiches, qui présente l’Allemagne comme LE modèle à suivre, et qui est aussi truffée de mensonges.
Bisou .

Erratum :

J’ai commis deux erreurs : concernant les facteurs de charge, et les coûts relatifs aux durées de vie.

Je pensais que Lazard avait travaillé sur la puissance installée. En fait non, les facteurs de charge utilisés étaient de 90% pour le nucléaire et 50% pour l’éolien. Pour l’actualisation, j’avais bêtement multiplié par trois les coûts éoliens car ne elles durent que 20 ans.

J’ai donc repris les données d’entrées de Lazard et appliqué à nos « spécificités françaises », sur les facteurs de charge et la durée de vie des installations. Mes nouvelles hypothèses sont donc les suivantes. Pour l’éolien, 23% et 20 ans. Le nuc, c’est 67% et 60 ans.

Pour le solaire, c’est 18% et 30 ans. A noter que Lazard avait initialement pris 40 ans pour la durée de vie d’une centrale. Pour les coûts, j’ai pris les chiffres des pages 18, 19 et 20 de l’analyse Lazard.

Total Capital cost pour l’investissement , fixed et variable O&M pour les coûts d’exploitation, et les coûts de combustible pour le nuc. J’ai aussi pris pour hypothèse, comme Lazard (page 17), que les coûts d’exploitation augmentaient de 2,25% chaque année (O&M escalation rate).

Je n’ai pris que ces données-ci pour calculer un coût total durant l’exploitation du parc et ramené à un coût moyen par MWh. Je tiens également à disposition mes fichiers excel si besoin.
[Contactez @Astrochnis sur Twitter pour ça]

Il s’agit donc de calculs hors coûts de réseau, de démantèlement et de gestion d’intermittence. Je n’ai pas regardé, dans un premier temps, les coûts de remplacements des parcs. Et il s’agit uniquement de déterminer les coûts bruts des différentes filières, pas de prendre en compte la fiscalité ou le financement.

Voici le premier résultat auquel je suis arrivé. Le nucléaire reste donc légèrement plus cher que l’éolien, dont acte. Et le solaire beaucoup moins cher.

Les écarts de ces résultats par rapport à l’étude initiale sont principalement dues aux variations de facteurs de charge, qui augmente substantiellement le coût de l’éolien. La baisse du coût du nucléaire vient de la durée de vie.

L’hypothèse américaine était d’une exploitation de 40 ans, j’ai pris 60.
Mais j’avais quand même l’impression de comparer des choux et des carottes du fait que les parcs avaient des durées de vie différentes. J’ai donc voulu calculer les coûts des remplacements des parcs en formulant plusieurs hypothèses : les coûts O&M continuent d’augmenter au rythme de 2,25% par an, et les besoins en investissement pour réinstaller les parcs sont les mêmes. C’est-à-dire que si à l’instant T on a besoin de 1000$ pour installer une éolienne,dans 20 ans on aura aussi besoin de 1000$.

Les facteurs de charges sont pris inchangés (hypothèse discutable, mais je n’ai pas d’infos sur ce qu’ils pourraient être dans 20 ou 40 ans). Et j’ai pris deux scénarios : les investissements nécessaires sont provisionnés ou pas. Provisionnés, cela signifie que les capitaux nécessaires aux remplacement existent dès le début du projet, mais sont placés de manières à être utilisés dans 20, 30 ou 40 ans. Pour les taux d’actualisation, je me suis basé sur la Banque de France.

J’ai donc pris la moyenne arithmétique des valeurs des TEC 20 et 30 ans sur les 12 derniers mois, soit 1,3% pour 20 ans et 1,66 pour 30 ans. Comme je n’ai pas trouvé de TEC 40 ans, j’ai pris arbitrairement 2%. Cela signifie en gros pour pour remplacer le parc éolien dans 20 ans, j’aurai besoin d’une somme entre 1200 et 1600 $/kWh, et que ça revient à disposer aujourd’hui de sommes entre 926 et 1273 $/kWh…

Et j’ai appliqué ces formules pour le renouvellement du parc solaire au bout de 30 ans, et deux renouvellement de parc éolien à 20 et 40 ans. Et voici le résultat :

Et j’ai aussi fait la même chose si les réinvestissements n’étaient pas provisionnés, dès le début.

Donc en synthèse, si on tient compte des remplacement de parc pour maintenir la production électrique, le nucléaire et l’éolien ont des coûts similaires, le solaire étant moins cher.
Et en conclusion, l’étude de 
@sdnfr reste quand même foireuse.

Au passage, dernier point sur cette étude de @sdnfr. Ils ont précisé que l’étude Lazard était applicable au reste du monde.
Seulement, le levelized cost of energy, tel que calculé par Lazard, dépend des taxes appliquées, et a pris pour hypothèse un amortissement sur 20 ans pour toutes les technologies (voir page 17 de l’étude). Donc non, ce n’est pas un modèle applicable en dehors des Etats-Unis.


#AntinucléairesVSclimat : « Le nucléaire est totalement hors délai », 2/2.

Première partie.

Thread initial :

On commence gentiment.

« Extraction de l’uranium, construction des centrales, gestion des déchets : la filière nucléaire émet aussi des gaz à effet de serre. »

D’une part, soyons clairs, personne ne prétend le contraire. Il suffit de voir la quantité de béton apparent d’une centrale nucléaire pour s’en douter.
D’ailleurs, dans le billet précédent, je parlais moi-même de remplacer du charbon par du « nucléaire à 50 grammes de CO2 par kilowattheure ».

Alors, le nucléaire émet des gaz à effet de serre, oui. Combien ? Là… Il y a deux grandes écoles : les antinucléaires ressortent régulièrement le nombre de 66 grammes d’équivalent CO2 par kilowattheure. Tandis que l’industrie française, mais aussi le GIEC, retiennent des Analyses de Cycle de Vie (ACV) à une dizaine de g/kWh. Entre 5 et 15, généralement 12 grammes.

Je vais aller chercher deux études pour cela. La première est celle systématiquement invoquée par les antinucléaires, celle de Sovacool et al. Et elle est accessible publiquement.
Cette étude, qui compile tout un tas d’études d’ACV du nucléaire dans le monde et en fait la moyenne (méthodologie discutable), aboutit donc à 66 g/kWh.
Mais c’est une pseudo-moyenne mondiale. Avec d’énormes disparités par pays. Je ne peux pas l’expliquer en détail, mais je peux l’illustrer par un exemple, l’enrichissement de l’uranium.
En France, jusque dans les années 2000 où l’on est passé à l’ultracentrifugation, l’enrichissement de l’uranium se faisait par un procédé que l’on appelle la « diffusion gazeuse ». On faisait ça à l’usine Eurodif, au Tricastin.

D’ailleurs, les tours aéroréfrigérantes que l’on voit surplomber la centrale du Tricastin depuis l’autoroute du soleil ou la LGV Sud-Est appartiennent à cette usine d’enrichissement, pas à la centrale nucléaire.

Notez, sur la photo précédente, la cheminée sur la gauche des tours aéroréfrigérantes. Cette cheminée et une ou les deux tours sont très souvent utilisés pour illustrer des centrales nucléaires, dans la presse française. Alors que l’on parle de deux des très rares tours aéro existantes en France qui ne soient pas rattachées à une centrale nucléaire ^^ ».

Une particularité de la diffusion gazeuse est qu’elles est EXTRÊMEMENT consommatrice d’énergie. Eurodif, qui produisait de l’uranium enrichi pour une centaine de réacteurs nucléaires en France et en Europe consommait à elle seule la production électrique de deux à trois des réacteurs du Tricastin, adjacents. Environ 2500-3000 MW pour l’usine d’enrichissement seule (depuis, avec l’ultracentrifugation, on est redescendus à 50-60 MW). 
Heureusement, 2500-3000 MW d’électricité nucléaire bas-carbone.

Mais dans un pays qui ferait de l’enrichissement avec de l’électricité majoritairement fossile (au hasard : USA, Russie, Pays-Bas, probablement aussi la Corée du Sud, le Royaume-Uni…), cet enrichissement serait fort émetteur de CO2.

Voilà un exemple qui illustre une possible explication des divergences dans les études.

Mais dans l’étude de Sovacool, qui s’intéresse au monde entier, est citée une étude s’intéressant au cas français (tableau 4 : Dones et al, 2003), et les valeurs d’intensité CO2 retenue par cette étude… cohérentes avec les 5 à 15 grammes par kWh défendus par l’industrie française ou retenus par le GIEC.
Valeurs qui montrent que le nucléaire peut être extrêmement bas-carbone.

Je signale que là, je conclus ce point en m’appuyant sur la source de référence des anti-nucléaires. Encore une fois, en analysant leurs arguments, ils se retournent contre eux…

Maintenant, une autre source que j’adore, une étude qui étudie l’impact environnemental (pas uniquement climatique) du cycle du nucléaire français.
Et elle aussi est accessible au public, bordel ! 😀

Cette étude, je lui consacrerai un thread et un billet dédiés, tant elle est géniale.

À noter qu’en raison de son âge (2014) et les dernières données auxquelles les auteurs ont eu accès, cette étude considère le cycle du nucléaire avec l’enrichissement par diffusion gazeuse.
Et elle aboutit à une valeur de 5.3 g/kWh, dont 1,7 grammes pour les mines, 0,6 pour l’enrichissement, 2,1 pour la (dé)construction des réacteurs, 0,4 pour le retraitement, et 0,1 pour la gestion des déchets.

Maintenant, petit rappel honnête : extraction des métaux (acier, aluminium, cuivre, métaux rares…), construction des centrales, gestion des déchets : toutes les filières énergétiques y ont recours, et donc émettent des gaz à effet de serre.
Rien n’égale les énergies fossiles, évidemment, mais l’éolien s’en retrouve au même niveau que le nucléaire (le GIEC retient 12 g/kWh). L’hydraulique aussi, parfois plus haut selon les sources.
Le photovoltaïque est quelque part entre 30 et 60 g/kWh. La biomasse, selon les cas, entre très bas et quelques centaines de grammes de CO2 par kWh.

Bien sûr, pour l’éolien et le solaire, on parle de production hors gestion de l’intermittence. Si l’intermittence est comblée par des batteries ou des centrales à gaz, il faut reconsidérer ces valeurs.

Bon. Maintenant qu’est atomisé le sophisme de la solution parfaite (non sourcé dans l’infographie, btw) sur les gaz à effet de serre du nucléaire, passons à la suite.

-6% d’électricité nucléaire produite dans le monde entre 2006 et 2017.

Let’s see.
Pourquoi 2006, pour commencer ?
Parce que c’est le maximum historique. Donc c’est ce qui permet de tirer le plus gros chiffre. En prenant 2005, on serait à -5%. Avec 2007, on serait à -4%.

Lien direct

Si on prend 2000 comme référence comme pour les données en haut à gauche de leur infographie, on est à +2%. Si on prend 2012, pour regarder l’évolution depuis l’après Fukushima-Daiichi, +7%.
Donc primo, le chiffre en lui-même ne vaut rien.

Deuxièmement, il faut regarder les causes de cette baisse. On va rester sur le référentiel 2006-2017, puisque c’est 2006 le maximum historique de production nucléaire mondial.
La variation, en valeur absolue, sur l’intervalle, elle est de -168 TWh. Qui fait baisser la tendance ?

Fukushima. Avant tout, Fukushima. 
La catastrophe de Fukushima-Daiichi a eu comme dommage collatéral de faire baisser la production nucléaire de 275 TWh au Japon et 91 TWh en Allemagne entre 2006 et 2017. Les seules autres baisses notables c’est Taiwan, avec -17 TWh (essentiellement à cause d’une mauvaise année 2017) et la France, -52 TWh, en raison d’une performance record du parc en 2005-2006 et peu glorieuse en 2016-2017.

Donc finalement, sans Fukushima qui a définitivement arrêté la moitié du parc japonais et temporairement arrêté l’autre moitié, et qui a donné un prétexte à l’Allemagne pour arrêter la moitié de son parc, l’autre moitié étant à suivre… Le nucléaire aurait progressé.

Fukushima n’a pas été une bonne chose pour l’industrie nucléaire mondiale, c’est un fait. Mais c’est un écueil dans une tendance positive, que ne reflète pas le chiffre avancé par le Réseau Sortir du Nucléaire

Il nous reste enfin à voir ce joli graphique intitulé :

« La part du nucléaire dans la production mondiale d’électricité n’a cessé de chuter »

Bon, on va balayer très vite le chiffre sur la part du nucléaire dans l’ÉNERGIE consommée.
Le nucléaire est un moyen de production électrique. Le comparer à toute l’énergie, donc au pétrole des transports, au gaz du chauffage, etc… C’est biaisé.
En plus, c’est s’exposer à un violent retour de flamme, puisque si le nucléaire représente, en 2017, 4,4% de l’énergie primaire consommée dans le monde, 596 Mtep sur 13511 Mtep d’après la banque de donnée BP (et non pas « moins de 2% », hou le mensonge…), l’hydroélectrique en représente 6,8%, à peine davantage. Et tous les autres renouvelables réunis représentent… 3,6%.

Donc si la conclusion sous-entendue par le Réseau Sortir du Nucléaire est « le nucléaire est négligeable », solaire et éolien le sont amplement davantage.

Donc le message, c’est quoi ?
« Rien ne peut faire face aux fossiles, abandonnons la lutte contre le dérèglement climatique ! » ?

Fail.

Ou soutien caché au charbon ou au gaz, allez savoir ? ¯\_(ツ)_/¯

Maintenant, si l’on se compare non plus à toute l’énergie mais par rapport à la production électrique…
Les chiffres du réseau SDN sont bons, cette fois, c’est déjà ça. Un max à 17,5% en 1996, pour moi, et 10,3% en 2017.

Mais dans l’absolu, la production nucléaire, elle a augmenté : 2407 TWh en 1996, 2635 TWh en 2017.

Tout simplement, elle a augmenté moins vite que la consommation électrique. Donc sa part baisse.
Évidemment, l’essor de la Chine, entre temps, y est pour beaucoup. Très beaucoup. Entre 1996 et 2017, la consommation électrique mondiale a augmenté de 11800 TWh. Dont 5400 rien que pour la Chine ! Et 1100 TWh pour l’Inde.

Conclusion logique ? On y revient : le nucléaire ne se développe pas assez vite (ah bon ?).

Et si l’on pense climat… Il faut donc développer le nucléaire beaucoup plus vite.
Merci @sdnfr pour votre bêtise qui soutient l’accélération du nucléaire ! ♥

#AntinucléairesVSclimat

Le Réseau Sortir du Nucléaire, regroupement d’associations et ONG professionnalisées ou non dans le militantismes antinucléaire, a renouvelé fin 2018 sa campagne « Le nucléaire ne sauvera pas le climat », visant à nier l’intérêt de l’énergie nucléaire dans la lutte contre le dérèglement climatique.

À l’appui de cette campagne, une infographie prétendant présenter un argumentaire derrière le slogan.

Une infographie à la rigueur scientifique plus que discutable que j’ai entrepris, épaulé de Twittos bien informés, de « débunker ».

Cela a été réalisé sur Twitter au travers de neuf threads, à raison d’un à deux par page de l’infographie. Tous ces threads sont regroupés dans le thread suivant.

Je vais entreprendre de les retranscrire sur ce blog, et tous seront indexés sur cette page, afin de ne pas alourdir le sommaire sur la page d’accueil avec 9 billets sur un même sujet.

Et on commence tout de suite.

« Le nucléaire est totalement hors délai », 1/2.

« Le nucléaire est totalement hors délai », 2/2.

« Le nucléaire, c’est trop cher ! »

« Nucléaire : inadapté à un climat dégradé ».

« Face au danger climatique, multiplier les dangers nucléaires ? », 1/2.

« Face au danger climatique, multiplier les dangers nucléaires ? », 2/2.

« Économies d’énergie + renouvelables = nucléaire arrêté + climat protégé ».

« Transition énergétique : l’Allemagne montre la voie ! »

#AntinucléairesVSclimat : « Le nucléaire est totalement hors délai », 1/2.

Thread initial :

On commence fort.

« En moyenne, 10 ans pour construire un réacteur ».

Là, j’ai deux options.

La première, c’est de faire l’idiot, et abuser de leur manque de contexte. Dans ce cas, je regarde différents parcs nucléaires mondiaux.
Exemple au hasard, le parc nucléaire français : le temps entre le lancement de la construction et la divergence du cœur, il est en moyenne de… 6,3 ans, d’après la base de donnée de l’AIEA. Et même de 6,0 ans si j’exclus les réacteurs de 1450 MW qui ont été plus problématiques.
On pourrait de telle sorte regarder des tas de pays qui ont eu des programmes nucléaires ambitieux : construire des réacteurs en plus de dix ans, c’est l’exception, pas la règle.

L’autre option, c’est d’être de bonne foi et supposer qu’ils ont oublié de préciser qu’ils parlent des réacteurs de 3è génération. Mais… Ça serait une approche illogique.
En effet, cela consisterait alors en une comparaison sur un échantillon réduit (une poignée de réacteurs en service) de têtes de série non représentatives.
Est-ce qu’on parle des performances de l’éolien sur la base du prototype de Smith-Putnam, aujourd’hui ?

Ou, plus sérieusement, pour comparer des sauts de générations à d’autres, est-ce qu’on juge l’éolien sous le seul spectre des balbutiements hors de prix de l’éolien offshore ?

https://www.usinenouvelle.com/article/les-industriels-de-l-offshore-eolien-rassures-les-six-projets-verront-bien-le-jour.N709819

Donc non, un réacteur d’une filière mature, ça ne se construit pas en dix ans en moyenne. Un peu plus de 5 ans, 6 à 7 disons. Au bénéfice d’un peu plus d’1 GW de production qui se révèle, si ce n’est toujours pilotable, constante, aux arrêts pour maintenance près.
Et si l’EPR, puisqu’il est donné en exemple, ne parvient à réduire ses délais et coûts à des niveaux raisonnables… Il perdra le marché, tout simplement, au profit des chinois, russes, coréens, américains. Les réacteurs actuels ou futurs.
Parce que la vision centrée sur la France et les difficultés de l’EPR n’est pas fidèle à ce qui se fait ailleurs dans le monde, avec un marché actif de 55 réacteurs en construction en Russie, Turquie, Brésil, Émirats Arabes Unis, Argentine, Chine, France, Inde, Pakistan, Ukraine, Taiwan, Slovaquie, Japon, Finlande, Biélorussie, Bangladesh, Corée du Sud, États-Unis.

Passons à la suite.

9% d’émissions de GES évitées en mettant un réacteur en service un réacteur tous les 15 jours, ce qui serait impossible ?

Les comparaisons sont foireuses : le nucléaire n’a pas vocation a être la solution unique alternative à toutes les formes d’énergies fossiles, mais surtout dans la production électrique. Et il n’est pas déployable dans le monde entier comme solution unique…

Alors jugeons-le non pas sur des extrapolations absurdes d’hypothèses infondées, mais sur ce qui a été, et ce qui peut être projeté à l’avenir.

Le record historique du nucléaire, c’est une augmentation de la production de 600 kWh/hab/an, en moyenne sur 10 ans. En Suède.

Donc là, on est certes dans de la haute performance, mais réaliste. 
Et l’on va évidemment considérer que le nucléaire vient à la place de production au charbon, car ça sera dans le futur notre objectif prioritaire.
On remplacerait donc 600 kWh/an/hab de charbon à ~850 gCO2/kWh par du nucléaire à ~50 g/kWh en comptant large. Gain de 800 grammes de CO2 par kWh nucléaire produit.
Et l’on parle d’une production en hausse de 600 kWh par an et par personne. Donc des émissions annuelles de CO2 par habitant qui baisseraient de 480 kg, et ce chaque année pendant 10 ans en moyenne.

Arrondissons à 500.

La moyenne de l’Union Européenne, elle est à 8700 kg de CO2 émis en 2017 par habitant. Qui refuserait de baisser ses émissions à 8200 kg en 2018 ? 7300 kg en 2019 ? Sous les 5 tonnes en 2025 ? C’est possible, en développant le nucléaire comme le fit autrefois la Suède.

C’est trop lent pour suffire. Mais c’est loin d’être négligeable. Le nucléaire n’est pas la solution, personne ne dira le contraire ; mais il en fait partie.

Quelques éléments de réflexion supplémentaires, sur ce sujet, dans ce précédent billet.

On passe à la suite.

Cinquante fois plus de capacités solaires et éoliennes auraient été installées dans le monde que de nucléaire, depuis 2000

Bon, je ne vais pas vous faire l’affront de vous expliquer la notion de facteur de charge, vous savez qu’aucun moyen de production ne produit 100% du temps à sa valeur nominale.

Avec 400 GW de nucléaire en service (en comptant les réacteurs japonais dont on attend le redémarrage) pour une production de 2500 TWh/an, on a un facteur de charge moyen de 71% – plombé, particulièrement, par le Japon.
Pour l’éolien, on parle, en 2017, d’une production de 1100 TWh pour un parc de 515 GW. Pour le solaire, 440 TWh pour 400 GW installés. Donc des facteurs de charge respectifs de 24% et 13%. C’marrant, ce sont exactement les mêmes valeurs que la France ^^ »

Donc si on raisonne en production moyenne et non plus nominale (ou « puissance crête »), les +35 GW de nucléaire, +399 GW de solaire, +497 GW d’éoliens mentionnés produisent respectivement l’équivalent de +25 GW, +52 GW et +119 GW.
Damned, c’est déjà beaucoup moins impressionnant.

Je vous rappelle que je fais une erreur grave, je suis désolé, je compare des choses pas comparable : la production nucléaire n’est pas intermittente comme le solaire ou l’éolien, elle…
Mais j’essaye d’expliquer simplement. Et, de toute façon, mon erreur est en défaveur du nucléaire, donc je me l’autorise.

Pour affiner sur l’intermittence, j’ai déjà abondé sur ce sujet ici et .

En prenant en compte le facteur de charge, on a réduit l’asymétrie, mais l’éolien colle toujours presque un facteur 6 au nucléaire !
Sauf que… Jetons un œil à une autre page de l’infographie, traitée par @astrochnis dans le thread ci-dessous…

Celle-ci nous apprend que le solaire et l’éolien auraient, pour afficher un tel développement, bénéficié d’investissements 20x supérieurs à ceux dans le nucléaire.

Donc.

Donc il est manifestement plus coûteux, d’après les données du Réseau Sortir du Nucléaire d’investir dans l’éolien et le solaire que dans le nucléaire.
À production égale. Et à plus grand service rendu pour le nucléaire (l’intermittence, tout ça…).


Bon, bah concluons simplement par… Oups ! ^_ ^

La suite de cette première page de cette infographie dans le billet suivant.
Moi, je m’en vais savourer cette fin où le pseudo-argumentaire des antinucléaires se retourne 🙃 contre eux quand on l’analyse intelligemment 😘


De la suffisance des réserves mondiales d’uranium

Ce billet est issu d’un thread rédigé en réponse à une question posée sur Twitter. Vous pouvez retrouver la question et le thread à ce lien ou ci-dessous.

La raison pour laquelle on peut tout entendre… C’est que ça dépend d’un paquet de paramètres.
Aux conditions actuelles d’extraction, d’enrichissement, d’utilisation, de recyclage, et compte tenu des réserves connues, ouais, environ 100 ans à consommation à peu près constante.
Mais y’a des variables d’ajustement à tous les niveaux du cycle du combustible :

  • extraction
  • enrichissement
  • consommation
  • recyclage

Ce qui limite ces ajustements, c’est un peu la technique, beaucoup l’économie : aujourd’hui, l’uranium coûte une misère, donc 0 effort pour l’économiser. On n’exploite que les gisements les plus riches, on enrichit sans forcer, on consomme sans optimiser, on recycle à peine.

Ce qui permettrait ces ajustements, ce serait un coût de l’uranium plus élevé… Justement quand il commencera à se faire un peu plus rare. Comme le pétrole où les gisements étaient plus nombreux au fur et à mesure que les prix sont montés. Comme toute ressource naturelle de stock, en fait (hydrocarbures, métaux…).

Et ce qui est cool avec le nucléaire, c’est que l’uranium c’est quelque chose comme 1-2% du prix du kWh payé par l’usager, en France en tout cas. De l’ordre de 0,15 centimes sur les 15 centimes que coûte un kWh.

On pourrait proposer un petit calcul d’ordre de grandeur pour le constater. La production électronucléaire française nominale est de 420 TWh pour 8000 tonnes « métal lourd » d’uranium naturel, soit 9400 tonnes d’octaoxyde de triuranium, la forme sous laquelle il s’échange sur les marchés.
Son prix
oscille actuellement autour de 35 US$/lb, soit 67 €/kg.
Cela nous conduit à 630 millions d’euros d’uranium, pour 420 millions de mégawattheures produits, donc un prix de l’uranium de 1,5 €/MWh, ou 0,15 centimes par kWh.

Donc même une augmentation d’un facteur 10 sur le coût de l’uranium, ça va augmenter le kWh d’un centime et demi sur plusieurs décennies, c’est négligeable.
Si les conditions économiques permettent d’envisager des paramètres d’ajustement du ratio consommation/stock d’uranium, quels sont-ils ?

Liste non exhaustive.

Exploitation de l’uranium naturel

  • 1) Exploiter des gisements moins riches. Très simple, faut juste vérifier que ça reste rentable.
  • 2) Exploiter des « gisements secondaires » : cendres de charbon, résidus miniers de d’autres industries minières… Même chose, rien de sorcier, juste une question de rentabilité.

Ces deux options permettent de gagner pas mal de ressources, sans changer les ordres de grandeur, je pense, mais sans être très chères.

  • 3) Exploiter l’uranium marin.

Là, on est sur une idée un peu folle, compliquée techniquement (et donc chère) à mettre en œuvre, mais extraire l’uranium naturellement dissout dans l’eau de mer multiplierait les réserves par… Beaucoup. Plus d’info dans le thread ci-dessous.

  • 4) Récupérer l’uranium hautement enrichi ou le plutonium des armes nucléaires. Ça s’est déjà fait, aucune difficulté technique ni économique, faut juste avoir des pays qui se désarment ^^

Enrichissement

  • 5) Il faut enrichir plus… En France, quand on enrichit l’uranium, on fait 1 tonne d’enrichi à 3-4% et 7 tonnes d’appauvri à 0,3% à partir de 8 tonnes de naturel à 0,7%.
    Si on poussait l’enrichissement pour réduire la teneur dans l’appauvri à 0,2%, voir 0,1%, alors on économiserait de l’uranium naturel, à production d’uranium enrichi égale.
    Mais enrichir coûte cher, et l’uranium naturel, aujourd’hui, ne coûte rien. On se fatigue pas, donc.
    Mais puisque l’appauvri n’est pas perdu mais sagement entreposé chez nous, on pourrait toujours ultérieurement en tirer encore un peu d’enrichi si le besoin le justifiait, pas de problème, c’est pensé pour.

Utilisation en réacteurs

  • 6) On peut tirer, en fonction du taux d’enrichissement, de sa fabrication, de son mode d’utilisation, plus ou moins d’énergie d’une tonne de combustible nucléaire. Là encore, question d’équilibre économique entre faire l’effort ou gâcher de l’U qui coûte rien.
    Et ce n’est pas marginal, parce qu’en augmentant un peu l’enrichissement (de 3.5% à 4.5%), on arrive à quasiment doubler la quantité d’énergie qu’on peut tirer d’une tonne de combustible. Toutefois, ça induit de multiples contraintes, sur la gestion du cœur et sur le retraitement. Rien d’insurmontable, ça s’est même déjà fait, mais ça coûte.

Retraitement-Recyclage

  • 7) Actuellement, en France, produit un peu plus de 10% de notre électricité nucléaire avec du combustible recyclé, avec le MOx (récupération du plutonium et de l’uranium du combustible usé et fabrication de combustible neuf avec).
    D’une part, on pourrait pousser ce concept plus loin, parce qu’aujourd’hui on ne récupère qu’une partie de l’uranium usé pour l’associer au plutonium, mais on pourrait aussi récupérer le reste et le ré-enrichir. C’est le projet d’EDF, de manière à monter à 25% de production à base de combustible recyclé d’ici l’horizon 2025.
    Pas de verrou technique, ça s’est déjà fait sur une centrale nucléaire avant d’être abandonné… Par raison économique.
    Par contre, le recyclage, même limité, est loin d’être généralisé au monde entier. Donc y’a un moyen de pousser plus loin le recyclage à échelle mondiale et donc d’économiser considérablement de la ressource en uranium.

Bon, jusqu’à présent, à part pour l’uranium marin, j’ai évoqué des solutions assez modestes et qui jouent marginalement sur l’ordre de grandeur. Capable de multiplier les ressources par 2, 3 , peut-être, j’en sais rien… Mais on va finir GRAND.

  • 8) La FUCKING surgénération. Le plutonium, on le recycle qu’une fois. Avec des réacteurs surgénérateurs, déjà, on va pouvoir le recycler des tas de fois. Et, surtout, on va pouvoir en produire des quantités astronomiques.
    Juste à base d’uranium appauvri. On a notre cœur de réacteur surgénérateur, enrobé d’uranium appauvri qui va absorber les neutrons qui vont s’échapper du cœur. ET PAF. Neutron, uranium 238, bim, plutonium 239. Bon, c’pas si simple, mais le résultat est celui-là.
    Et du coup, en France, on se retrouverait à pouvoir alimenter un parc de surgénérateurs plusieurs millénaires, voire plusieurs dizaines de milliers d’années.
    Juste avec l’uranium appauvri qu’on a déjà en stock, purifié, entreposé, tout prêt. Sans avoir plus besoin d’extraire un gramme du sol (une fois le cycle lancé, ce qui nécessite une longue phase de transition tout de même).
    Et à l’échelle mondiale, c’est l’idée aussi. En ajoutant la surgénération basée non plus sur l’uranium, mais sur le thorium (+ abondant que l’U), c’est encore plus la fête du slip.

Bon, par contre, la surgéné, c’est compliqué – faisable, des réacteurs l’ont montré (Phénix…) et le montrent encore (BN-600, 800…) – mais compliqué. Et donc cher à terme, très cher aujourd’hui (car pas mature).
Un peu comme l’extraction de l’U marin. Mais du coup, le jour où les réserves d’uranium commencent à être un problème, on a 6 variables (à ma connaissance) d’ajustement pour se donner un peu de large…

Et se mettre sérieusement à bosser sur les 2 dernières variables qui, elles, ne donnent pas « un peu de large » mais des réserves… Illimitées, en fait, à l’échelle de notre civilisation.

Voilà mon petit panoramique. Basé sur mes souvenirs de cours du cycle du combustible et d’économie du nucléaire. J’prétends pas l’exactitude parfaite, notamment ce qui concerne l’extraction qui est hors de mon périmètre, mais l’essentiel y est, je crois !